Reportage : l'hôpital d'Arras, le précurseur mise sur le Wifi
Dossier par yves Grandmontagne, 1603 mots
Le centre hospitalier d'Arras associe la mobilité et la convergence voix-données sur IP. Il a généralisé l'usage du Wifi dans les services médicaux, pour le téléphone et les échanges informatiques.
Faire gagner du temps aux personnels hospitaliers et produire des actes de soins avec une plus grande sécurité, tels sont les bénéfices des réseaux déployés par le DSI du centre hospitalier d'Arras.
« Hôpital du futur ? Non, c'est notre réalité au quotidien. Cet hôpital, nous l'avons rêvé en 2001 , débute Philippe Huddlestone, le responsable du service informatique & télécoms du Centre Hospitalier d'Arras. C'est en 2001 que l'hôpital a pris le virage du numérique en adoptant les nouvelles technologies de l'information en axe stratégique de développement dans son plan directeur. Cela s'inscrivait dans le cadre du plan Hôpital 2007 de modernisation des structures hospitalières et du choix de reconstruire un ensemble qui datait des années 60 plutôt que de le restaurer, ce qui aurait été plus coûteux.
La reconstruction a mobilisé 150 millions d'euros de travaux, et 6 millions pour les équipements. L'hôpital a réouvert ses portes au public en février 2007.
Une coopération des équipes médicales
et informatiques
« Derrière le médecin en charge du projet, avec les autres médecins, les infirmières, le personnel hospitalier, nous avons beaucoup échangé et nous avons créé de nouveaux outils, de nouveaux concepts et revu notre façon de travailler pour améliorer tout cela, poursuit le responsable. Désormais, "Les soignants accèdent au dossier de leur patient en mobilité ou sur leur bureau, et disposent de l'accès à l'appel du patient pour maintenir le contact avec lui."
Photo : Philippe Huddlestone, le responsable du service informatique & télécoms du Centre Hospitalier d'Arras
Les personnels se sont appropriés les outils informatiques
« La conduite de ces multiples projets doit se faire de manière souple et réactive. On doit s'adapter tout en maintenant l'activité de l'hôpital, précise Philippe Huddlestone, Nous souhaitons également ouvrir ce dossier patient vers l'extérieur, tout en conservant une sécurité et une traçabilité importantes. Ce dont je suis le plus fier, c'est de voir ces équipements être adoptés par les soignants et les équipes pour devenir leurs outils via leur façon de travailler. Et c'est une réussite. Cette fierté, je la retrouve chez l'infirmière, chez le cadre, chez le médecin qui utilisent ces outils et prennent presque du plaisir à trouver l'information disponible et à trouver une véritable efficacité dans leurs actes. »
Intégrer les paramètres vitaux
Le projet aura coûté au total environ 330 000 €. Une extension de la mobilité consistera à récupérer les paramètres vitaux du patient (pouls, tension, ...) et une intégration dans le dossier du patient, quelque soit l'endroit où celui-ci se trouve lors de la consultation. L'hôpital d'Arras réunit en tout 1200 lits. En 2006, 2300 salariés et 200 médecins ont travaillé pour 46 900 entrées, 27 700 passages aux urgences et 72 000 consultations.
Des robots de transport automatisés en Wifi
L'hôpital d'Arras exploite six chariots de transport entièrement automatisés. Ils apportent le linge, les repas et la pharmacie et ils redescendent les déchets. Ils se guident par laser et communiquent en IP via Wifi avec le centre de contrôle. Il s'agit d'une logistique révolutionnaire ...
... basée sur des chariots transporteurs automatisés ou AGV (Automated Guided Vehicules) qui assurent les flux de linge, de repas, de la pharmacie et des déchets.
Des robots autonomes
Ces robots entièrement autonomes se guident par laser via des repères sur les murs et communiquent en Wifi. « Ils embarquent un système Wi-Fi pour recevoir des informations et un système IP pour prévenir les logisticiens, décrit Philippe Huddlestone. Le responsable du pilotage des robots précise : « Ces robots effectuent plus de 350 missions par jour, soit environ 8000 jobs par mois. Humainement ce ne serait plus réalisable de faire ces travaux à la main ! Les trajets sont énormes, les chariots traditionnels pèsent entre 80 et 300 kg, c'est lourd et l'hôpital est vaste. » A l'avenir, l'hôpital devrait acquérir de nouveaux chariots afin de passer à 500 missions par jour.
Les chariots automatisés montent dans les étages de l'hôpital le linge, les repas, la pharmacie et ils redescendent les déchets:
Philippe Huddlestone, devant un robot de transport qui déplace des charges adaptées et prend l'ascenseur :
Le point de garage de l'ensemble des chariots automatisés dans l'hôpital :
Des tablettes informatiques afin d'accéder au dossier patient
Le centre hospitalier a équipé ses personnels de tablettes informatiques afin de leur donner accès au dossier du patient en mobilité. Une quinzaine de tablettes sont déployées. Il s'agit du premier déploiement en France des nouveaux ordinateurs médicalisés développés par Intel. La tablette informatique donne accès au dossier du patient dans sa chambre, mais également au sein du poste central de soins, avec les résultats médicaux, ainsi que pour le paramédical.
Un code barre identifie le patient à l'aide d'un bracelet, et on a la possibilité de prendre des photos pour suivre l'évolution des patients. En recentrant le soignant sur le patient, l'hôpital fait sa révolution tout en allant plus loin dans des démarches de sécurité et de fiabilité des actes de soins, sans oublier l'inévitable recherche de réduction des coûts de fonctionnement. Et tout le monde y gagne : « Un gain de temps, par une accessibilité complète et permanente à tous les éléments concernant un patient, commente le docteur Emmanuel Mulliez, chirurgien en chirurgie viscérale et urologique, qui insiste, Ce n'est plus nécessairement à un moment donné et dans un bureau donné que l'on récupère l'intégralité du dossier du patient et de ses examens. Ça peut être n'importe où, n'importe quand, même au bloc opératoire. Je me verrais mal reprendre une activité dans un centre hospitalier qui ne serait pas numérisé et informatisé. »
L'accès au dossier du patient s'effectue en mobilité sur une tablette PC :
La téléphonie sur IP à la fois fixe et mobile
L'hôpital d'Arras a déployé la téléphonie sur IP. Cela concerne 1500 postes. Fait marquant, 70% d'entre eux fonctionnent sur Wifi en mobilité. Des applications évoluées de renseignement ont été développées en XML sur ces terminaux.
Le numérique et la mobilité, avec la convergence des trafics voix-données-vidéo sur le même réseau, s'imposaient afin d'alléger les tâches administratives, logistiques et de recherche d'information du personnel soignant. Ces tâches sont "chronophages" et occupent 60% du temps d'une infirmière. Les téléphones IP vont bien au delà de la seule téléphonie, ce qui évite au personnel de s'encombrer d'une multitude de matériels. La téléphonie Wi-Fi donne accès à une information événementielle 'simple', du type « indication et gestion d'un appel d'un patient », « ouverture des portes de services dans les secteurs protégés », « la dictée de courrier », ou encore « alerte et localisation d'un personnel en difficulté ».
« C'est un bon outil de travail, on identifie chaque infirmière de secteur, les demandes des patients et les connaissant on évalue le niveau et l'urgence de l'intervention, confient des infirmières.
Les combinés téléphoniques IP fixes et mobiles (sur Wifi) déployés à l'hôpital d'Arras:
Les services multimédia au lit du malade
Des services multimédia sont disponibles depuis le lit du malade. Le même terminal permet aux personnels hospitaliers de consulter et de modifier le dossier du patient.
Dans les chambres, le malade dispose d'un terminal sur un bras articulé afin d'accéder à des services depuis son lit, tels que la télévision, la radio, Internet, des jeux, et bientôt la vidéo à la demande (VOD) ainsi qu'un accès à la boutique de l'hôpital.
Le multimédia participe ici à l'amélioration du séjour. Il s'agit d'une première nationale. 500 terminaux ont été installés.
L'écran installé donne accès à la fois à des services multimédia de loisirs et au dossier du patient :
En introduisant sa carte d'authentification au bas de l'appareil, le personnel accède au dossier médical du patient via ce terminal, ce qui permet de le visualiser et de le compléter :
Le terminal est placé sur un bras articulé afin d'accéder à des services multimédia depuis son lit :
Un réseau à haut débit et du Wifi
L'hôpital d'Arras a mobilisé les moyens en réseaux informatiques les plus récents afin de constituer sa dorsale et la couverture Wifi des bâtiments.
Depuis 2001, l'équipe informatique de l'hôpital a mis en place un certain nombre d'outils, de socles d'infrastructure. On relève une dorsale de réseau à 20 Gbit/s avec 4600 points de connexion. La couverture Wifi a été particulièrement soignée avec 500 bornes Wi-Fi. La continuité d'activité est assurée au travers de deux salles informatiques redondantes, pour assurer la disponibilité permanente des données. Chaque salle possède ses serveurs en lames et un SAN de 16 To, dont les baies sont dupliquées en temps réel. L'objectif est un taux de disponibilité de 99,999%.
L'hôpital a retenu des baies de disques SAN de la société Pillar Data Systems :
L'hôpital a déployé un réseau de desserte en commutation Ethernet alimentant ses téléphones IP :
Du côté du Wifi, 500 points d'accès ont été installés dans l'hôpital :
Les serveurs sont des machines en lames, doublées entre deux salles informatiques afin d'atteindre un niveau de disponibilité élevé :
Plusieurs prestataires spécialisés
Des prestataires aux compétences très spécialisées ont été retenus lors de la définition et de la réalisation du projet inédit de l'hôpital d'Arras.
NCS et Televic ont été retenus pour l'indication et la gestion de l'appel patient, Zenidoc pour la gestion de la dictée numérique via IP, Ekahau pour la gestion d'alerte et la géo localisation d'une personne via Wifi (triangulation)lorsqu'il s'agit de retrouver une personne en difficulté, et la protection du travailleur isolé sous technologie Wi-Fi, NCS et FMC pour la gestion du système AGV, il s'agit des transporteurs robots roulants automatisés qui se guident par laser via des repères sur les murs et communiquent en Wifi.
Le moteur de workflow de Zenidoc a servi à l'automatisation des processus événementiel ; des applicatifs ont été développé en XML vers les téléphones IP.
En temps habituel, l'équipe informatique de l'hôpital d'Arras emploie 11 salariés en interne, et deux prestataires en moyenne.
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