Nicolas Petit
Directeur de la Division Mobilité de Microsoft France
Le bulldozer Microsoft bouscule le vaste chantier de la mobilité. Nicolas Petit, directeur de la division mobilité de Microsoft France nous explique comment évolue le marché de Windows Mobile et comment l'éditeur se démarque de concurrents actifs comme Nokia ou Blackberry.
R&T : Comment se porte votre marché ?
Nicolas Petit : Le marché de la mobilité explose. La France rattrape le Royaume Uni et l'Espagne. L'Europe, véritablement en pointe, croit de près de 50% par an. Les Etats Unis quant à eux compensent rapidement leur retard et l'Asie continue évidemment à être très dynamique.
Le marché des PDA classiques continue à progresser, mais les PDA communicants prennent dorénavant le relais. La frontière devient de plus en plus ténue entre smartphones et PDA communicants. Les fabricants sortent beaucoup de produits hybrides, avec ou sans clavier. Ces produits concurrencent de plus en plus les mobiles haut de gamme.
Tous produits mobiles confondus, y compris l'entrée de gamme, la part de marché de Windows Mobile oscille autour de 30%. A périmètre équivalent sur le marché de référence des smartphones et PDA communicants, notre part de marché avoisine les 75%. Nous devançons Nokia et Blackberry sur ce marché spécifique.
R&T : Comment évoluent les terminaux ?
N.P : Les types des « facteurs de formes » (formfactor) explosent. Les constructeurs relayent les nouveaux usages, et intègrent beaucoup plus de fonctionnalités multimédia. Les opérateurs ont déployé des réseaux haut débit, ils tentent dorénavant de faire décoller les usages. Le terminal est la porte d'accès à ces usages. Les constructeurs essaient donc de coller au plus près aux besoins des consommateurs. Ils segmentent le marché et sortent des terminaux spécifiques pour certains types de communautés. Les capacités multimédias sont de plus en plus valorisées, y compris dans le monde des professionnels. La photo par exemple devient un outil d'authentification et de preuve. Les terminaux GPS commencent d'autre part à se généraliser sur les mobiles haut de gamme. Les équipements s'affinent, deviennent plus légers, possèdent des interfaces plus ergonomiques et intègrent de multiples réseaux (cellulaires, Wifi, DVB-H et bientôt Wimax). La tendance est de faire en sorte que ces terminaux évolués deviennent accessibles. Les tarifs baissent, et des smart phones d'entrée de gamme commencent à apparaître sur le marché. On trouve maintenant des mobiles sous Windows Mobile 5.0 à quelques dizaines d'euros, avec subvention opérateur.
R&T : Après un an, rétrospectivement, qu'apporte la version 5.0 de Windows Mobile ?
N.P : Windows Mobile 5.0 est dorénavant mature. Elle s'intègre fortement au système d'information de l'entreprise. La mobilité devient une extension naturelle du S.I. Le déploiement d'applications métiers s'en trouve ainsi simplifiée. Au delà du changement de version, WindowsMobile 5.0, améliore la productivité individuelle et collective. L'utilisateur peut lire et modifier ses fichiers Word, Excel ou Power point. Le mobile devient une extension du poste de travail. Avec Office Communicator (ndlr : MSN pour les pro), vos interlocuteurs peuvent accéder à l'annuaire de l'entreprise, connaître votre disponibilité et adapter leur mode de communication. Pour finir, Windows Mobile 5.0 est plus robuste que la version 2003. De plus Exchange Server intègre nativement les fonctions de mobilité, ce qui permet notamment de gérer une flotte de terminaux ou d'effacer des données critiques à distance.
R&T : Face à Blackberry, les terminaux Windows Mobile pêchent parfois par leur manque de fiabilité, leur lenteur et la courte durée des batteries. Pourquoi ?
N.P. Je ne veux pas dédouaner l'O.S. mais ces caractéristiques sont aussi très liées aux constructeurs et à la qualité des composants. La durée de vie des batteries est par exemple très impactée par la qualité du stack GSM ou Bluetooth. Certains terminaux gèrent efficacement la partie radio. Les batteries durent ainsi beaucoup plus longtemps. Tout n'est donc pas imputable à l'O.S. Cependant, le ralentissement constaté est du à la gestion de la mémoire persistante. L'effet peut être accentué par des processeurs très peu cadencés. Concernant la fiabilité, la version 5.0 a tout de même bien amélioré les choses. Le marché explose, la concurrence va générer plus de choix et donc plus de QoS.
R&T : Qui de Blackberry, Symbian ou Linux, est le plus menaçant ?
N.P. RIM est un concurrent sérieux sur la messagerie mobile. Sur les applications métiers en revanche, nous avons su construire un écosystème de partenaires qui nous donne une large avance sur Blackberry. Le Canadien tente de rattraper son retard, mais cela ne se construit pas du jour au lendemain. Il y a aujourd'hui beaucoup d'effets d'annonce sur ce marché. On dénombre plus de 18 000 applications sous Windows Mobile contre quelques centaines chez RIM. Symbian est pour nous très représenté à Nokia. C'est un concurrent que nous regardons avec beaucoup d'attention. Nous conservons notre avance sur les applications verticales mais le Finlandais demeure très actif. Quant à Linux, c'est aujourd'hui un grand mystère ! C'est un vrai framework de développement qui a son sens sur les marchés publics où la contrainte de coûts est très sensible. Cependant, il est difficile de voir l'intérêt aujourd'hui de Linux sur le mobile. Le marché des distributeurs Linux est très hétérogène. En cas de déploiement, qui assurera la maintenance des applications ? Ce n'est pas très rassurant pour les entreprises et les partenaires. Nous sommes donc confiants mais attentifs.