Un marché régulé des télécoms est le pire système à l'exception de tous les autres, selon le président de l'ARCEP
Le secteur des télécoms est sous pression. Jean-Ludovic Silicani, président de l'ARCEP, a affirmé l'importance d'un marché concurrentiel régulé à l'occasion des Assises du Très Haut Débit. Même si c'est le pire des systèmes à l'exception de tous les autres.
((Mis à jour - 10/07/2012 - 10h)) Lors des Assises du Très Haut Débit tenues le 9 juillet, Jean-Ludovic Silicani, président de l'Arcep, a insisté sur l'importance d'un marché des télécoms concurrentiel et régulé. C'est le pire des systèmes à l'exception de tous les autres aura-t-il indiqué. Et de citer notamment l'économie administrée ou le libre jeu total du marché.
Il rappelle qu'en France, ni SFR, ni Bouygues Telecom, ni Free, ni aucun des autres opérateurs ou FAI n'existeraient aujourd'hui si cette animation concurrentielle effectuée par le régulateur n'avait pas existé. Et de citer quelques chiffres. En 15 ans d'ouverture du marché, celui-ci a doublé en volume.
Le PIB national n'a progressé, dans le même temps, que de 20 %. "Et, au cours de ces 15 ans, l'emploi dans les TIC devenus l'économie numérique (dont les télécoms et internet sont le nerf de la guerre), est passé d'environ 300 000 à près d'un million de personnes en France ! Quel autre secteur a connu un tel succès ?"
Faisant implicitement écho aux propos de Stéphane Richard, PDG de France Télécom, qui parlait d'une Europe des télécoms malade, et pointait la centaine d'opérateurs du vieux continent en comparaison des quatre opérateurs principaux sur le sol américain, Jean-Marie Silicani veut tirer le bilan de cette consolidation américaine.
Photo : Jean-Marie Silicani, Président de l'Arcep
Il déclare : "Quelle est la situation aux Etats-Unis ? Il y a, effectivement, moins de concurrence, et un mouvement de concentration des opérateurs a eu lieu. Quel est le résultat ? En 10 ans, la destruction de 400 000 emplois, soit 30% des effectifs du secteur. Ça n'est pas une surprise. Les rapprochements d'opérateurs se font généralement pour réaliser des économies. Et, cerise sur le gâteau, les prix de détail sont deux fois supérieurs à ce qu'ils sont en Europe. Ainsi, ni les salariés, ni les consommateurs n'y ont, en définitive, trouvé leur compte".
De quoi porter la contradiction au moment où le secteur des télécoms est sous pression.
Le PDG de France Télécom déclarait ainsi il y a peu que la France allait à l'inverse de ce qui se faisait à l'étranger en faisant entrer un 4ème opérateur mobile sur le marché au moment où il devenait critique d'investir.
De même la destruction des emplois inquiète, et on pense forcément à l'impact de Free Mobile. Arnaud Montebourg, Ministre du redressement productif avait ainsi souhaité rencontré les syndicats de SFR et de Bouygues Télécoms, et les représentants des opérateurs après l'annonce de récents plans de départ et d'économies.
De plus, Arnaud Montebourg, et Fleur Pellerin, Ministre déléguée en charge de l'économie numérique, avaient alors affirmé que dans un secteur tel que les télécoms, réglementé et protégé de la concurrence internationale, tout doit être fait pour éviter que des emplois soient détruits ou délocalisés. De même, ils annonçaient que tout doit être fait pour éviter que les investissements nécessaires tant à l'aménagement des territoires qu'à la compétitivité et la croissance de l'économie soient remis en cause ou retardés.
Pour sa part, Jean-Marie Silicani estime que « l'on ne peut pas accuser les régulateurs européens des télécommunications d'être obsédés par la concurrence. » Selon lui, au bout du compte, en définissant le cadre juridique des déploiements, les régulateurs des télécoms ont facilité l'investissement dans les réseaux, qui sont pourvoyeurs d'un nombre considérable d'emplois.
Il veut retenir que l'Arcep s'est particulièrement illustrée en ce domaine. "On est progressivement passé d'une concurrence par les infrastructures, à une concurrence par les services et par la mutualisation d'une part importante de l'infrastructure".
Pour la fibre optique, le cadre réglementaire prévoit une mutualisation de 90% des investissements. Et pour la 4G mobile, l'Arcep incite les acteurs à mutualiser leurs réseaux sur plus de 60% du territoire.
Il souligne que c'est la complémentarité des offres de déploiement qui « permettra de répondre aux besoins immédiats des territoires ruraux comme des territoires enclavés, sans remettre en cause l'objectif de long terme d'un accès au très haut débit pour tous »
Selon lui, chaque solution, haut et très haut débit, par voie hertzienne, voire même satellitaire, a une importance dans la couverture du territoire français en attendant le très haut débit pour tous.
Le président de l'Arcep a conclu en rappelant que le seul objectif de l'Arcep est de réaliser un travail concret associant « les acteurs publics nationaux et locaux et l'initiative privée » , tout en évitant « les contre-vérités et erreurs de raisonnement grossières » qui risqueraient de faire prendre beaucoup de retard à la France dans l'adoption du Très Haut débit.