Télécoms et audiovisuel : Bouygues en quête d'une stratégie
Dans la téléphonie mobile, les marges de Bouygues sont sous pression, tandis que dans la télévision, TF1 subit les assauts de ses concurrents. Les rachats dans la TNT et le lancement d'une offre quadruple play ne permettront sans doute pas de faire l'économie d'une remise à plat de la stratégie télécom du groupe.
(Source EuroTMT) Il y a une dizaine d'années, le groupe Bouygues était dans une situation difficile. Obligé alors d'investir lourdement pour déployer le réseau de sa filiale dans la téléphonie mobile, le groupe voyait ses finances se dégrader, tout en étant sous la pression de Bolloré, devenu un actionnaire inamical. Dix ans plus tard, si la menace d'une OPA sauvage est, depuis longtemps, écartée (la famille contrôlant le capital grâce au soutien de l'actionnariat salarié), Bouygues doit à nouveau naviguer dans des eaux tumultueuses. Une situation financière qui se dégrade Le groupe a en effet désagréablement surpris les investisseurs, en annonçant, lors de la publication de ses comptes du premier trimestre, une nette dégradation de ses marges et une révision à la baisse de son objectif de chiffre d'affaires pour l'ensemble de l'année. Pour le premier trimestre, Bouygues a indiqué que son chiffre d'affaires était en baisse de 2 %, son résultat opérationnel étant en chute de 55 % à 174 millions d'euros. Alors qu'ils considéraient jusqu'à présent Bouygues comme une valeur défensive, les analystes ont revu leur jugement, constatant que le groupe n'était pas immunisé contre la crise économique. Mais c'est dans cet environnement dégradé que Bouygues voit aussi l'environnement des communications (télécoms et audiovisuels) être bouleversé, l'obligeant à des choix peut-être douloureux. Téléphonie mobile : solide croissance mais marges qui s'effritent Dans la téléphonie mobile, si la filiale affiche une solide croissance (+5 % au premier trimestre), elle voit ses marges se dégrader (un recul de 8 % de l'Ebitda), en raison de la hausse des frais commerciaux induite par le succès de ses offres (144 000 nouveaux abonnés, contre 51 000 clients gagnés au premier trimestre 2008) et du coût de ses investissements dans l'ADSL (un impact négatif de 22 millions au premier trimestre). Et les marges devraient demeurer sous pression durant toute l'année, des analystes estimant que l'aventure dans le haut débit fixe pourrait peser à hauteur de quelque 100 millions d'euros sur l'ensemble de l'exercice. Le renforcement dans la TNT ne règlera pas tous les problèmes de TF1 Dans l'audiovisuel, on connaît la situation très difficile de TF1, en perte opérationnelle au premier trimestre en raison de la baisse de ses recettes publicitaires. Si la chaîne leader a annoncé sa volonté de se renforcer dans la TNT en montant au capital de TMC (pour un coût de 192 millions d'euros), cette opération ne règlera qu'une partie des problèmes de TF1. D'autant que l'environnement pourrait rapidement évoluer cette année. Suite à la victoire en appel de France Télécom dans le dossier Orange Sports, SFR (qui s'est pourvu en cassation) réclame la levée des obligations imposées par le Conseil de la concurrence lors du rachat des activités de Tele 2 et, surtout, après celui de TPS (dont TF1 était le principal actionnaire) par Canal +. Si le groupe Vivendi obtenait gain de cause et pouvait resserrer les liens entre ses deux filiales, le développement de Bouygues Telecom dans le haut débit fixe pourrait se révéler bien plus difficile et coûteux (malgré le lancement de son offre quadruple play). Bouygues coincé entre Orange et Vivendi Coincé entre deux ensembles (Orange et Vivendi) misant sur les contenus, le groupe Bouygues verrait alors ses actifs dans l'audiovisuel et dans les télécoms être fragilisés. Sans oublier, l'arrivée à terme d'un quatrième acteur mobile (si le gouvernement finit par délivrer la licence), qui, si Iliad devait gagner cette licence, pourrait le concurrencer directement dans le quadruple play. Compte tenu de ces incertitudes sur l'avenir, Bouygues doit revoir sa stratégie dans le secteur des communications, au un moment où ses finances lui laissent peu de marge de manoeuvres.