SD-WAN : Solution autogérée ou service géré ?
Avant de s'orienter vers une solution SD-WAN, les entreprises doivent aussi se demander qui la mettra en oeuvre et qui la gérera.
Si pour certaines entreprises, la décision de choisir une solution SD-WAN autogérée ou un service géré est relativement facile, d'autres auront besoin d'un peu plus de temps. Mais, dans un cas comme dans l'autre, les meilleures pratiques en matière de sourcing imposent de faire ce choix dès le départ : en effet, pour espérer des résultats probants, il faut que la stratégie de sourcing, et l'approche et l'exécution qui s'ensuivent, soient adaptées à la solution - autogérée ou entièrement gérée - souhaitée. Si l'entreprise dispose d'une solide et conséquente équipe réseau en interne, avec des compétences logicielles/de routage et d'autres compétences complémentaires en ingénierie, la mise en oeuvre d'un réseau SD-WAN est tout à fait envisageable. Même si elle doit éventuellement acquérir de nouvelles compétences pour tirer parti de la technologie et comprendre pleinement la modalité SD-WAN choisie.
Il est également important de bien encadrer le processus de sélection des fournisseurs et de savoir clairement dès le départ quel projet pilote elle souhaite mettre en place, tant pour choisir les produits qui correspondent à ses besoins spécifiques que pour poursuivre la formation de l'équipe interne. Il faut également éviter de consacrer trop de temps aux aspects exclusivement techniques et de mise en oeuvre du projet aux dépens de la nécessaire adaptation organisationnelle. Parce que le réseau étendu SD-WAN promet, en particulier, de répondre de façon plus optimale aux besoins des applications, il y a lieu de s'interroger sur la manière dont l'équipe réseau peut s'aligner avec les équipes d'application. L'approvisionnement SD-WAN repose sur un processus plus itératif que des technologies plus matures comme le MPLS (MultiProtocol Label Switching).
Gagner en souplesse
De solides arguments plaident en faveur d'une approche plus souple que l'ancien appel à proposition (Request for Proposition - RFP), qui soit à la fois plus rapide, toujours robuste, mais permet à l'entreprise d'être opérationnelle plus rapidement. C'est l'approche dite de demande d'informations « Request for Informations » - RFI+ ». Elle consiste en partie à montrer, dans un projet pilote conséquent, comment utiliser des solutions directes pour résoudre des points faibles avérés et convaincre au passage toutes les parties prenantes de l'entreprise sur les avantages de la solution. Une nette amélioration des performances est toujours utile pour justifier le bien-fondé d'une décision auprès des dirigeants et des utilisateurs professionnels et, plus largement, pour mieux expliquer à quoi devrait ressembler l'architecture finale du réseau. Il faut aussi s'accorder un certain degré de flexibilité pour capitaliser sur ses expériences et se laisser la possibilité de modifier et d'optimiser le projet initial.
Si l'entreprise ne dispose pas d'une forte équipe réseau en interne, elle doit prendre garde à la chose suivante. Le discours marketing autour du SD-WAN promet une configuration quasi automatique, un contrôle centralisé et une reconfiguration rapide, moins d'efforts d'ingénierie, une optimisation facile de la gestion du trafic applicatif grâce à une technologie intelligente et un référentiel de règles et de politiques applicatives prêtes à l'emploi, le tout soutenu par des performances, une visibilité et des capacités d'analyse sans précédent. Même si tout cela est vrai dans une certaine mesure, les personnes non averties ne doivent pas se laisser séduire en imaginant que l'entreprise peut désormais s'autogérer (y compris pour l'implémentation). Ce n'est pas si simple. L'entreprise doit comprendre ce qu'elle a et ce dont elle a besoin, et admettre que mener cette transition sans l'aide d'un tiers va probablement au-delà de ses capacités collectives. Il est rare que les entreprises reprennent soudainement en main la totalité du contrôle, même si cela peut signifier une implication plus importante en aval.
Plus difficile avec un équipe interne fournie
La voie la plus sage consiste à choisir un fournisseur de services gérés (MSP) compétent avec lequel elle pourra travailler, mais aussi à demander de l'aide pour choisir le MSP approprié. Car les critères de sélection dépassent largement la simple question de la connectivité WAN. Il s'agit d'évaluer minutieusement les capacités des candidats MSP, leur adéquation avec l'entreprise, de déceler les manques dans leurs offres et d'analyser les dispositions commerciales (pas seulement les chiffres clés) qui pourraient peser sur la bonne relation entre l'entreprise et le fournisseur. L'entreprise ne devrait pas non plus se contenter de choisir son fournisseur de services mobiles actuel sans entreprendre un travail comparatif et sans faire valoir la concurrence. Elle se priverait de la possibilité d'identifier des offres MSP plus adaptées ou de trouver des entités plus spécialisées et plus axées sur la technologie SD-WAN. Et les deux présentent des avantages et des inconvénients.
Pour les entreprises dotées d'une architecture réseau et de capacités de support, celles qui disposent d'une équipe interne très spécialisée et bien outillée jusqu'à celles qui ont adopté un modèle MSP largement externalisé, les choses peuvent être plus difficiles à gérer. Cela s'explique essentiellement par le fait que l'éventail des options de mise en service est plus large. Les entreprises dotées d'une certaine capacité (ou d'une capacité de substitution, si l'on inclut celles qui ont des accords de sourcing plus larges pouvant couvrir des domaines comme le support des applications, la gestion des postes de travail, les installations, les appareils réseau, etc.) auront peut-être besoin d'envisager un plus grand nombre d'options. Elles peuvent par exemple décider de sélectionner directement leurs technologies au lieu de chercher à évaluer les technologies des MSP (généralement limitées à une ou deux variantes de SD-WAN) avec lesquelles elles travaillent. Les modèles commerciaux ne seront pas directement comparables, et elles devront identifier chaque fois les pièges potentiels de chacun.
Equilibrer risque opérationnel et habitudes
Le partage de responsabilités entre l'entreprise et les tiers peut être étendu, chaque partie ayant alors plus d'exigences pour prévenir les manques et définir des limites effectives. Cette compréhension du service, de l'impact opérationnel et commercial de ces responsabilités, et leur mise en évidence, est une tâche importante. Encore une fois, cet aspect ne devrait pas être laissé au hasard - l'entreprise doit chercher de l'aide extérieure si nécessaire. Elle doit savoir ce qu'il est important de consigner tout au long du processus, depuis le choix initial, les efforts de mise au point, le pilotage, jusqu'aux accords commerciaux définitifs.
Ce que l'entreprise mettra en place avec la déclaration d'intérêt et l'évaluation initiale (y compris, une appréciation mesurée du discours marketing) sera payant au moment de l'analyse de rentabilité et la clôture finale du contrat. Elle a tout intérêt aussi à avoir une idée globale de l'architecture de son réseau final - cela dépend entre autres choses de l'état du réseau initial et de sa capacité au changement, de son ambition (son goût du risque), du type d'entreprise (commerce de détail, services financiers, fabrication) et de sa culture - et donc, de ce qu'elle espère réaliser à moyen et long termes.
Faire jouer la concurrence
Dans tous les cas, l'approche du sourcing devrait commencer par un travail plus exploratoire afin de réduire les choix, d'obtenir certains engagements clés et de relativiser le discours marketing. L'entreprise a également tout intérêt à faire jouer la concurrence, tout en laissant la porte ouverte à une collaboration suivie. Cette approche « RFI+ » fonctionne bien, mais quel que soit le nom qu'on lui donne, il est important de valider les décisions et les engagements finaux par la mise en oeuvre d'un projet pilote significatif dans lequel s'inscrira la future collaboration.
A propos des auteurs : Mark Sheard (Managing Director UK - msheard@techcaliber.com) et Jack Deal (Managing Director - jdeal@techcaliber.com) sont consultants chez TechCaliber Consulting (TC2). Ce cabinet mondial de conseil en IT et en réseaux dédié aide les entreprises clientes à développer et à mettre en oeuvre des stratégies de transformation technologique et de sourcing.
Illustration PikWizard