Réagir face aux projets informatiques qui vont dans le mur
Les projets informatiques qui vont dans le mur sont sans doute plus nombreux qu'on veut bien le reconnaître. Trois DSI, ceux de Beauté Prestige International, Pernod Ricard et B2V ont évoqué leur expérience en la matière lors d'une table ronde ebg. Pour en tirer plusieurs enseignements.
Trois DSI, ceux de Beauté Prestige International, Pernod Ricard et B2V, ont croisé leurs témoignages lors d'une table ronde organisée mardi 15 avril dernier par l'ebg (Electronic Business Group), consacrée aux projets informatiques mal engagés et aux meilleures façons d'y remédier. Il était tombé dans un guêpier On a pu constater qu'ils présentent de nombreux points communs. Premier cas, Christophe Davy qui a repris la direction des systèmes d'information de Beauté Prestige International, la filiale française du groupe cosmétique japonais Shiseido. Il était tombé dans un guêpier. L'extranet de prise de commandes des distributeurs venait d'être livré par un prestataire extérieur et ne marchait vraiment pas. « On tapait 2, ça sortait 400, décrit Christophe Davy. Il fallait donc continuer à la main. Le fournisseur promettait d'y remédier dans les cinq semaines, à condition de payer un supplément. Et bien sûr, passé ce délai, ça ne marchait toujours pas. L'échec était prévisible Discrètement, Christophe Davy a mis en place une solution issue d'un autre site cosmétique, puis rompu avec le prestataire qui n'était pas à la hauteur. Ceci dit, l'échec était prévisible : ce prestataire en était à sa première expérience de développement en XML ; personne n'avait piloté le projet en interne à cause de la vacance de la DSI pendant six mois ; la recette avait été bâclée ; et le contrat n'avait prévu aucune obligation de résultat. Conclusion de Christophe Davy : « il est impossible de rattraper quoi que ce soit quand ça ne passe plus ni avec le prestataire, ni en interne. Autant repartir de zéro. » Il avait calé sur le dernier volet du spécifique Vincent Fraitot, DSI de Pernod Ricard Europe, pour sa part, voulait installer à Madrid un ERP JD Edwards commun à toutes les filiales européennes. En s'appuyant là encore sur un intégrateur externe. Tout allait très bien jusqu'au jour où cet intégrateur changea subitement son chef de projet, réclama des délais supplémentaires et bien sûr des sur-coûts. En réalité, il avait calé, sans l'avouer, ...... sur le dernier volet des développements spécifiques. Ces délais lui furent accordés une première fois, mais pas une deuxième. Vincent Fraitot s'en est sorti en terminant lui-même l'intégration avec les meilleurs consultants de toutes les filiales rappelés d'urgence à Madrid. Il a également repris trois consultants du prestataire, qui lui ont d'ailleurs été fort utiles pour la documentation. « Les choses se seraient peut-être passées différemment si nous avions eu une visibilité sur ce qui restait à faire au prestataire. Mais les contrats au forfait ne le permettent pas, explique-t-il. Le socle SOA n'est toujours pas réalisé Autre échec chez le groupe de protection sociale B2V. Claude Buzier y avait été appelé comme DSI pour piloter la refonte des deux systèmes d'information - retraites complémentaires d'une part et prévoyance-santé d'autre part, ainsi que la mise en place par un prestataire extérieur d'un socle commun de technologie SOA (Service Oriented Architecture) de gestion des cotisations, des encaissements et du CRM. Le tout représentait un projet de 17 millions d'euros au total. La double refonte a été concluante. Le socle SOA, en revanche, n'est toujours pas réalisé, le prestataire ne maîtrisant pas la combinaison Java - Open Source, ni ses développements au Maroc. Une fois de plus, le contrat au forfait a empêché de voir où on en était. « Il aurait fallu placer chez le prestataire quelques personnes de chez nous, déjà bien formées à ces nouvelles technologies, regrette Claude Buzier. Discuter avec les clients de ses prestataires Premier enseignement de ces ratés : il est essentiel de ne pas se tromper sur le choix des fournisseurs. Avant de s'engager, Christophe Davy (Beauté Prestige International) va donc ...... également discuter avec les clients des prestataires, ayant déjà implémenté avec eux les mêmes technologies. Thierry de Cassan, du cabinet Ytea, spécialisé dans la gestion du changement, conseille aussi d'impliquer des opérationnels métiers dans la direction du projet car les problèmes arrivent généralement sur les aspects métiers. A ne pas écarter non plus, selon Claude Buzier (Groupe B2V), le Plan d'assurance qualité, qui fixerait les responsabilités de chacun. Prévoir un plan B en interne Second enseignement : toujours prévoir un plan B en interne. Mais attention, la sortie de crise ne viendra jamais des personnes responsables des blocages. « Il faut trouver d'autres interlocuteurs, qui sauront prendre les bonnes décisions, avance Vincent Fraitot (Pernod Ricard). On pourra faire appel aux juristes internes, mais seulement comme une menace, car la bonne solution n'est jamais de s'auto-détruire dans d'interminables contentieux. « Le projet ne peut qu'échouer si le chef de projet est mauvais, a rappelé Bernard Guéhennec, directeur général de Sogeti France. Mais peut-on éviter de refaire toujours les mêmes erreurs ? Depuis sa mésaventure de Madrid, la DSI de Pernod Ricard organise des réunions téléphoniques mensuelles entre tous ses consultants JD Edwards.