Rachats dans les sociétés de technologie : cela ne fait que commencer
Les récentes acquisitions de sociétés de technologie pour des montants faramineux par des poids lourds du secteur ne sont qu'un début, selon des experts. IBM devrait être le prochain à sortir son chéquier. Quant à Riverbed technology et F5 networks, ils sont en tête de liste de rachats potentiels.
Depuis quelques mois, il ne se passe pas une semaine sans qu'un géant de la technologie américain n'annonce une acquisition représentant au moins plusieurs milliards de dollars. Forts d'une meilleure résistance à la crise que lors de l'éclatement de la bulle internet, d'une abondante trésorerie et de valorisations encore basses suite au plus bas (sur 12 ans) touché par les Bourses mondiales en mars dernier, les mastodontes du secteur ont lancé une course à la taille qui ne semble pas prête de se terminer. HP a lancé son offre de rachat du fabricant d'équipements de réseaux 3Com pour 2,7 milliards de dollars. Le premier fabricant mondial de PC, qui avait profité de cette annonce pour publier à l'avance des résultats trimestriels légèrement meilleurs que prévus et relever ses prévisions annuelles pour 2010, veut ainsi clairement concurrencer Cisco, le numéro un mondial des équipements réseaux, qui fait lui-même des incursions étonnantes sur le marché des serveurs que se disputent HP, IBM ou encore Dell. Le rachat de 3Com par HP fait suite, entre autres, à celui de Perot Systems par Dell, celui d'Affiliated Computer Systems par Xerox, celui de Sun Microsystems par Oracle. Cisco, société habituée à grossir par des opérations de croissance externe, a de son côté annoncé en octobre d'une part le projet de rachat de Starent Networks, un fabricant d'équipements mobiles, pour 2,9 milliards de dollars et une OPA sur Tandberg, spécialiste norvégien d'équipements pour visioconférences en mode téléprésence, pour un prix de 3,4 milliards de dollars. Selon plusieurs analystes, malgré l'abondance de projets de rachats, cette nouvelle phase de concentration n'en est qu'à ... Photo : le discret PDG d'IBM, Sam Palmisano a reçu le prix de l'innovation technologique pour le supercalculateur Blue Gene, des mains du président Obama, en octobre dernier à la maison Blanche. IBM est attendu sur le front des grosses acquisitions dans les mois qui viennent. ... ses débuts, chacun des grands noms du secteur redoutant de se retrouver sur la touche. Tous les regards sont désormais tournés vers IBM qui est le dernier à ne pas avoir annoncé de grosse acquisition. Après la mode de la spécialisation extrême, c'est le grand retour d'une tendance poussant les groupes à être présent sur tous les maillons de la chaîne des produits et services informatiques. L'émergence récente de ce que les spécialistes appellent le « cloud computing » n'est certainement pas étrangère à cette évolution qui pousse les grands groupes à élargir les frontières de leurs activités. De plus, les dirigeants sont également poussés par les actionnaires à l'accroissement du périmètre afin de profiter au maximum de la reprise qui se profile. Avec la vague de fusions et d'acquisition en cours, les acteurs de niche semblent également plus disposés à être rachetés, conscients qu'un adossement à IBM ou à Cisco leur permet de démultiplier les débouchés pour leurs produits. Des groupes comme Riverbed Technology (spécialiste de l'accélération télécoms) ou F5 Networks, spécialisé dans la sécurisation et l'amélioration d'applications en ligne, sont ainsi considérées comme les prochaines cibles de rachat. Malgré leur récents rachats ou annonces de rachat, HP et Dell devraient ... ... continuer à être actifs en matière d'acquisitions, estiment les analystes financiers, qui voient également Juniper Networks entrer dans la danse afin de ne pas se laisser trop distancer par Cisco. IBM, de son côté, est vu comme étant davantage intéressé par les logiciels que par les services et les équipements. Le paradoxe de cette course à la taille est que, pour reprendre les déclarations de John Chambers, directeur général de Cisco, 90 % des acquisitions se révèlent être un échec. John Chambers - qui a su transformer le routeur en or sur ces dix dernières années - a par exemple toujours refusé de donner suite à des projets de rachat d'un grand équipementier télécoms traditionnel tel qu'Alcatel-Lucent, estimant qu'une acquisition ne peut marcher que si le racheté est de petite taille (quelques centaines de personnes), et d'une culture compatible avec celle de l'acquéreur. Cela ne l'avait toutefois pas empêché d'acheter Scientific Atlanta, poids lourd champion des modems câble. Mais son discours visait plutôt l'équipementier canadien traditionnel Nortel qui avait acquis le fabricant de routeurs Bay Networks. Il avait alors raison puisque Nortel est vendu par appartements depuis plusieurs mois. Durant la période faste, avant l'éclatement de la bulle internet, Cisco achetait une start up spécialisée (gigabit Ethernet, voix sur IP, connectivité optique, ...) par mois. « Lucent a ses Bell Labs pour la recherche, nous rachetons des start up » expliquait alors Mike Volpi, qui était le grand orchestrateur de ces rachats chez Cisco. Qui plus est à cette époque, Cisco réglait ses achats par émission d'actions, créant ainsi son propre papier monnaie. Ce qui ne lui coûtait pas grand-chose comparativement au rachat de Tandberg qui va s'effectuer en liquide.