Orange veut bien racheter Bouygues Télécom, mais pas tout seul
Bouygues Télécom annonce depuis une semaine une stratégie destinée à rester indépendant. Pour autant, les discussions avec Orange ou Free ne semblent pas abandonnées, mais simplement suspendues.
Pourquoi le rachat de Bouygues Télécom envisagé par Orange ne s'est-il pas conclu ? Est-ce une question de prix ? Ou bien ce projet n'était-il qu'une simple rumeur ou un test lancé par l'un des protagonistes ? Gervais Pélissier (en photo), ancien directeur financier devenu directeur Europe d'Orange, a apporté quelques précisions lors du colloque des Echos, « Telco&Digital Forum », ce jeudi 12 juin.
«D'abord a-t-il rappelé nous ne pouvons agir seul ». Même si l'opérateur historique se défend d'être aussi dominant qu'avant, il ne peut racheter des concurrents sans l'aval des Autorités de la concurrence. Et dans ce but, son dossier doit présenter les meilleurs atouts. Ce rachat, si rachat il y a, ne se fera qu'à plusieurs. Seul, l'opérateur historique ne pourra conclure l'opération. Free ferait un allié naturel, le groupe de Xavier Niel a besoin d'un réseau en propre et, selon l'agence Bloomberg, il aurait déposé un projet avec un prix compris entre 4 et 5 milliards d'euros, jugé très insuffisant par Bouygues.
Sur le même sujetBouygues Télécom veut rester indépendant et se donne six mois pour se transformerLe Gouvernement exerce aussi toute son influence. Il est actionnaire d'Orange et proche de Bouygues Télécom (du moins jusqu'à l'annonce de suppressions de postes mercredi 11 juin). Cette pression empêche, mais c'était le cas avec les précédents gouvernements, des opérateurs étrangers de participer à la recomposition en France. Deutsche Telekom par exemple a fait état de sa volonté de croissance externe de même que Telefonica. L'espagnol est d'ailleurs devenu un partenaire commercial de Bouygues Télécom dans les grands comptes, mais ne pourra aller jusqu'à un partenariat capitalistique.
La question des sureffectifs
Gervais Pélissier a également surpris son monde en déclarant qu'Orange ne pouvait accueillir « tout ce qu'il y a de sureffectifs sur le marché ». Ce qui n'est pas tendre pour Bouygues Télécom. Mais Orange est de son côté dans un projet de réduction des coûts et des effectifs sur plusieurs années, sans suppressions de postes, en jouant de la pyramide des âges qui inexorablement réduit son personnel. L'opérateur est également bloqué par le statut de fonctionnaires et par un gouvernement qui lui enlève de toute façon toute marge de manoeuvre. La gestion des effectifs est pour lui un problème douloureux, elle semble l'être également pour la filiale de Bouygues qui doit se délester de 1 500 personnes. L'annonce de Bouygues sur les réductions d'effectif laisse également penser que son organisation commerciale est à revoir. Pascal Pro, le Pdg de l'opérateur Legos souligne la nécessité pour (tous) les opérateurs de revoir leur OSS, exploitation opérationnelle de réseau et leur BSS, gestion de services clients.
«Ce n'est donc pas évident » commente Gervais Pélissier. Selon Les Echos, Orange envisage bien le rachat de Bouygues Télécom, ce serait en cash et avec un autre opérateur, on pense à Free. Mais Bouygues Télécom se lance depuis une semaine dans une série d'annonces afin de démontrer que sa seule stratégie est de rester indépendant, ce qui semble pour le moins contradictoire avec un rachat.