Orange attaque le projet SFR / Bouygues Télécom de partage de réseau
La recomposition du secteur des opérateurs télécoms emprunte deux voies. Celle des rachats comme l'a montrée la vente de SFR et celle du partage des réseaux comme l'ont esquissés l'accord Orange / Free et le projet entre SFR et Bouygues Télécom.
En dénonçant l'accord signé entre ses deux concurrents, SFR et Bouygues Télécom, fin janvier, Orange déverse de l'acide sur la plaie. Cet accord signé avant le rachat de SFR, reste juridiquement valable. Normalement il doit s'exécuter, faute de quoi les parties prenantes paieront des dédommagements. En particulier Bouygues Télécom que SFR a menacé d'un milliard d'euros de pénalités. Rappelons que cet accord porte sur le futur réseau que les deux partenaires veulent mettre en commun afin d'investir plus facilement. Investir seul devenant au-dessus de leurs moyens, laminés qu'ils sont par l'arrivée de Free Mobile.
Orange a donc beau jeu de rappeler qu'investir est la clé de l'économie dans les télécoms et que visiblement ses concurrents sont loins du compte. Free est d'ailleurs «hébergé » sur le réseau d'Orange. Ce dernier montre que malmené lui aussi par l'arrivée du groupe de Xavier Niel, il détient quand même bon nombre de commandes. Les dirigeants d'Orange estiment même que la baisse des prix ne peut plus guère se poursuivre, en tout cas elle fera moins de dégâts. La prochaine bataille se fera sur les réseaux et là, ni Bouygues Télécom, ni SFR, ni Free ne sont de taille face à Orange qui est non seulement en position dominante mais entend bien le montrer. Nulle arrogance mais une leçon d'économie des télécoms adressée aux concurrents, aux régulateurs et aux pouvoirs publics.
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Fort de la reconduction de son Pdg, Orange est d'ailleurs passé à l'offensive. Selon nos confrères des Echos, le groupe a saisi l'Autorité de la concurrence, en demandant la suspension de la mise en place de l'accord SFR / Bouygues Télécom jusqu'à la fin de l'année. Orange veut que les deux régulateurs, l'Arcep et l'Autorité de la concurrence, se prononcent avant que l'accord ne soit effectif. Orange reprochant à ses deux concurrents d'aller beaucoup plus loin qu'une mutualisation. Ils craignent également que Free ne récupère certaines antennes, 7 000 en tout, qui seraient « décommissionnées » c'est-à-dire non utilisées par les deux partenaires sans être pour autant démontées.
Orange montre les crocs, non sans argument. Le jeu est en fait très complexe. On ne sait toujours pas ce que Bouygues Télécom compte faire avec cet accord. S'il le rompt SFR le menace de pénalités. S'il le poursuit, la situation serait paradoxale, mais Bouygues s'est bien réconcilié avec Free, tout est donc possible. C'est sans doute ce qui inquiète Orange. Free pour sa part est toujours aussi discret, entre son accord avec Orange (pour la 2G et la 3G) et ses obligations de couverture de réseau. La recomposition par les réseaux est bien tout aussi essentielle que la recomposition par les fusions.