Louis Naugès : c'est quoi, le piratage ?
Editorialiste respecté, observateur du secteur informatique depuis l'ère précambrienne de la bascule J-K à triode, Louis Naugès nous blogue un article sur la revente d'occasion des licences Microsoft . Un investissement logiciel compte nécessairement dans les actifs de l'entreprise, et en toute logique, rien ne devrait interdire de le « réaliser », de le revendre, dans certaines circonstances .Notamment suite à une cessation d'activité, lorsque l'administrateur judiciaire doit payer les créanciers. Si la chose est illégale en France, elle est parfaitement admise Outre Manche, pays appartenant à l'espace Européen. Il est donc possible d'y acheter du Windows Server 2003 à des prix dignes de ceux que l'on peut lire au fil des spams américains. Naugès met le doigt sur un point de droit canon pavlovien: persuader des clients qu'il est logique d'acheter quelque chose de fondamentalement abstrait, de non transmissible, d'incessible, à durée de vie limitée, impossible à dupliquer... Bon sûr, mais c'est bien sang ! C'est l'exacte définition de ce qu'impose la Dadvsi ! En arguant du fait que de la musique numérique, c'est avant tout du numérique avant même que d'être de la musique, les professionnels de la chanson industrielle ont tenté -avec succès- de copier (sic) les pratiques du «software ». Là où le bât blesse, c'est qu'en achetant 45 grammes de Kyo, on ne bénéficie pas des mêmes niveaux de service que ceux qu'offrent 175 grammes de SQL Server. Pas d'assistance utilisateur, nulle garantie d'échange contractuelle en cas de destruction accidentelle du médium, encore moins de tarifs préférentiels permettant de migrer de « Jérémiade 1.0 » à « Lamentations 2.10 » puis « pleurs et sanglots 3.15 », le tout agrémenté de quelques add-in et goodies, petits cadeaux qui entretiennent l'amitié et la fidélité d'un bon acheteur. Louis Naugès a mille fois raison -comme d'hab- lorsqu'il estime que rien ne devrait entraver la REvente de licences corporate sur le marché de l'occasion. C'est non seulement un moyen efficace pour lutter contre le piratage des moins riches (et des économes), mais également une conséquence logique de l'obsolescence des programmes. Les entreprises les plus fortunées achètent les productions dernier cris à peine leur sortie de Seattle, et revendent derechef les vieux stocks qui peuvent encore servir, opération d'amortissement rentable d'un point de vue comptable. Précisons que les contrats de « leasing » englobant logiciel et matériel ne sont pas très éloignés de cette manière de considérer les choses. Compte tenu du « turn over » qui caractérise l'édition de programmes, les acquéreurs de ce marché de l'occasion bénéficieront d'un parc capable de fonctionner quelques années encore, et compatible avec des configurations matérielles légèrement dépassées. Après tout, lorsqu'une ritournelle à la mode devient insipide à force d'écoute, le disque retourne parfois dans les bacs des filières de l'occasion. Les rengaines les plus insupportables sont refourguées au poids du plastique, les arias impérissables retrouveront, un jour, un nouvel acquéreur. Il serait temps que, juste retour des choses, l'industrie du logiciel s'inspire, un peu, des pratiques du monde de la variété.