Les stratégies d'Azure et d'EC2 pourraient converger avec le temps
Microsoft, avec Azure, et Amazon, avec EC2 (Elastic Compute Cloud), se sont attelés à deux catégories bien différentes de cloud computing. Au fil des mois, pourtant, leurs offres respectives pourraient se retrouver sur le même marché, si l'on en croit Tim O'Brien, directeur senior du groupe stratégie plateforme de l'éditeur de Redmond.
Alors que le cloud Windows Azure se présente comme une « platform as a service » (PaaS), fournissant aux développeurs les outils dont ils ont besoin pour construire et déployer des applications web en ligne, le cloud EC2 d'Amazon est avant tout une « infrastructure as a service » (IaaS), offrant un accès à la demande pour des instances de machines virtuelles personnalisables.
A l'occasion du Cloud leadership Forum, récemment organisé par IDC et IDG Enterprise (Santa Clara, 13-15 juin), Tim O'Brien, directeur senior du groupe stratégie plateforme de Microsoft, a comparé les mérites respectifs des deux types de plateformes. Un point de vue qu'il a également présenté à nos confrères de Network World. En premier lieu, Azure simplifie la mise au point d'applications web, ce que ne fait pas Amazon. En revanche, les machines virtuelles d'EC2 présentent l'intérêt de fonctionner avec de multiples modèles de programmation, souligne Tim O'Brien. Selon lui, à terme, l'éditeur de Windows Azure va probablement évoluer davantage vers le modèle IaaS, tandis qu'Amazon fera le chemin inverse vers le PaaS.
PaaS : un modèle de programmation agnostique
« C'est une épée à double tranchant, a-t-il expliqué lors de l'interview. Ce qui est apprécié avec les IaaS, c'est leur modèle de programmation agnostique. Les hyperviseurs de type 1 (machines virtuelles bare metal) ne se préoccupent pas du langage utilisé pour écrire l'application. Peu importe les outils que vous utilisez et les runtimes que vous ciblez. Si l'application fonctionne sous Windows ou Linux, donnez-lui une machine virtuelle et elle fonctionnera très bien. Le problème réside dans le travail supplémentaire que cela représente. Vous êtes responsable de cette machine virtuelle de la même façon que vous l'êtes pour un serveur situé sous votre bureau. C'est vous qui la mettez en route, vous qui l'arrêtez, vous qui lui appliquez les correctifs ou mises à jour nécessaires. Si Red Hat fournit une rustine Linux et que vous avec une machine virtuelle Linux qui s'exécute sur Amazon, vous devrez appliquer cette rustine vous-même. Personne ne le fera à votre place ».
Autant d'inconvénients qui n'existent pas avec le modèle PaaS où ces questions sont hors de propos. « Le développement s'y fait de façon fluide : vous codez une application, vous la déployez et elle fonctionnera sur la plateforme fournie par ces runtimes. Dans notre cas, il s'agit de PHP, C#, dans le cas de Google [App Engine], c'est Python et Java. » Néanmoins, le Paas comporte lui aussi ses points faibles. Il est en effet facile d'y bâtir de nouvelles applications, sans avoir besoin d'installer de serveurs en interne ni de logiciels (si ce n'est un navigateur web). En revanche, le modèle PaaS n'est pas forcément optimal pour faire migrer les applications existantes du datacenter vers le cloud.
Les différences entre les modèles vont s'estomper
Microsoft a déjà annoncé qu'il comptait donner (probablement dans les douze prochains mois) la possibilité d'installer un hyperviseur de type 1, pour que vous y faire tourner les applications, a rappelé Tim O'Brien. De son côté, Amazon propose d'une part sur EC2 des machines virtuelles offrant un choix de systèmes d'exploitation Windows ou Linux, et d'autre part, dans le cadre de son activité Amazon Web Services différents outils qui peuvent servir aux développeurs, notamment des bases de données, des services de stockage et d'équilibrage de charge. Tim O'Brien s'attend donc à ce qu'Amazon construise, à terme, une offre PaaS qui ressemblerait davantage à ce qu'est aujourd'hui Azure plutôt qu'à l'actuel EC2.
Pour l'instant, « la question n'est pas de savoir si l'un des modèles [IaaS ou PaaS] est meilleur que l'autre : ils permettent des choses différentes », statue le directeur senior du groupe stratégie plateforme de Microsoft. Néanmoins, Tim O'Brien croit qu'une convergence va s'opérer sur le marché entre les deux modèles avec, d'un côté, des fournisseurs d'IaaS comme Amazon qui mettront en place les éléments nécessaires pour devenir des PaaS. Et de l'autre, des sociétés comme Microsoft qui complèteront leurs capacités d'infrastructure dans une direction qui facilitera grandement les scénarios de migration. Les différences entre les deux modèles vont alors s'estomper.
Le cloud privé présente peu d'intérêt pour les PME
Lors de son intervention sur le Cloud Leadership Forum, Tim O'Brien a rappelé que les services de cloud public n'apportaient généralement pas autant de personnalisation que les clients le souhaitaient. Malgré tout, le modèle du cloud gagne en popularité à la fois parmi les utilisateurs de grandes entreprises qui voudraient contourner leur département informatique, et au sein des PME qui, elles, cherchent à se débarrasser des problématiques IT. Ces dernières ne vont pas se mettre à installer de clouds privés. « L'expression ne figure tout simplement pas dans leur vocabulaire. Ce qu'elles veulent, c'est faire tourner leur entreprise avec des PC et des téléphones portables et s'affranchir totalement des questions informatiques », souligne Tim O'Brien. A l'évidence, les clouds privés n'apportent pas la même économie d'échelle que les clouds publics, insiste le dirigeant. Selon lui, le coût total de possession par serveur dans un datacenter de 100 000 serveurs est moitié moins élevé que dans un datacenter de 1 000 serveurs.
L'objectif de Microsoft est d'offrir aux clients dans le cloud des fonctionnalités identiques à ce qu'ils auraient s'ils installaient eux-mêmes le logiciel, affirme-t-il. « Si vous pouvez développer une applications pour Windows Server, vous devriez être capable de l'écrire aussi pour Windows Azure », conclut-il.
Pour l'instant toutefois, Microsoft lui-même reconnaît que les versions cloud de ses logiciels n'offrent pas encore l'intégralité des fonctionnalités disponibles dans les versions classiques.