Les smartNIC peinent à entrer dans les entreprises
Selon un rapport du cabinet Dell'Oro, le coût et l'expertise sont les principaux obstacles à l'usage des smartNIC par les entreprises. Mais les fournisseurs de NIC font des efforts pour les éliminer.
Le fort développement des datacenters hyperscales et des charges de travail d'entreprise gourmandes en processeurs, pour le calcul haute performance (HPC) et l'IA en particulier, devrait favoriser l'adoption à grande échelle des smartNIC. Nous avons d'ailleurs consacré un dossier aux accélérateurs pour centres de données. Le cabinet d'études Dell'Oro prévoit que le marché des contrôleurs et adaptateurs Ethernet devrait passer de 3,2 milliards de dollars en 2021 à 5 milliards de dollars en 2026, une croissance due en grande partie à l'adoption des smartNIC. De plus, la connectivité des réseaux de serveurs va connaitre des gains de vitesse importants : le cabinet d'études prévoit que, dans cinq ans, les ports à 100 Gb/s et plus représenteront 44 % des livraisons.
Le port NIC standard de 25 Gbits est plus que suffisant pour les entreprises dont les tâches réseau courantes se limitent à la gestion de bases de données et de sites Web. Mais, le groupe Dell'Oro pense que la vitesse élevée des smartNIC, qui gèrent mieux le trafic réseau et soulagent les CPU de la charge du réseau, offrent une belle opportunité. « Les smartNIC remplaceront les NIC traditionnelles dans la plupart des infrastructures cloud hyperscale pour les charges de travail générales et de pointe comme l'informatique accélérée », a expliqué Baron Fung, directeur de recherche chez Dell'Oro Group. « Cependant, les fournisseurs de smartNIC, comme Intel, AMD, Nvidia et Marvell Technologies, devront faire des efforts sur les coûts de propriété et sur la mise en oeuvre afin de favoriser une adoption plus large des smartNIC au-delà des seuls hyperscalers », a ajouté le directeur de recherche
Une intégration complexe
Une smartNIC coûtera trois à dix fois plus chère qu'une NIC ordinaire. Comparativement, une NIC 25Gbit standard coûte en général entre 60 et 70 dollars par port, contre 300 à 500 dollars pour une smartNIC. « L'augmentation est donc assez conséquente », a ajouté M. Fung. La programmation d'une smartNIC représente aussi un autre défi. Les hyperscalers comme Google disposent de l'infrastructure et des ressources d'ingénierie nécessaires pour vraiment maximiser l'usage d'une NIC programmable. Ce qui ne sera pas le cas des entreprises moyennes. « Comme elles ne pourront probablement pas optimiser pleinement leur usage, il sera difficile pour ces entreprises de justifier un prix plus élevé et une consommation d'énergie plus importante liés à l'usage des smartNIC », a encore déclaré M. Fung.
Selon lui, si certains fournisseurs essayent d'accompagner leurs clients en leur proposant des kits de développement logiciel (SDK) avec un support d'application smartNIC spécifique pour construire des solutions clé en main, cette démarche semble nécessaire s'ils veulent favoriser l'adoption des smartNIC ailleurs que chez les hyperscalers. Mais cela prendra du temps. Pour l'instant, l'Ethernet 25 Gbits est la norme et le restera au moins pendant les trois à cinq prochaines années. Au-delà, M. Fung pense que la vitesse à 100 Gbits deviendra la norme, et que les smartNIC seront livrées avec des dispositifs de stockage haut de gamme, comme les matrices NVMe over fabric et les systèmes d'IA. « Chaque système d'IA Nvidia DGX est équipé de son DPU Bluefield », a-t-il rappelé. L'affrontement des quatre géants du semi-conducteur sur un marché d'entreprise relativement modeste peut paraître étrange, mais M. Fung voit deux raisons à cela : « D'une part, c'est un marché en croissance qui devrait atteindre un TCAC de 25 % au cours des prochaines années, ce qui est plus rapide que l'ensemble de l'industrie. D'autre part, tous les fournisseurs peuvent se présenter sur ce marché avec un portefeuille complet de produits associant CPU, GPU et DPU, un triptyque dont a beaucoup parlé Nvidia », a expliqué M. Fung.