Les intégrateurs réseaux bientôt tous opérateurs télécoms ?
Les installateurs, devenus intégrateurs réseaux, pourraient bien désormais devenir des opérateurs télécoms en marque blanche. Ce saut implique de remplir plusieurs conditions que la Ficome développe dans ses ateliers spécialisés. Le dernier se tenait à Paris le 23 juin.
Etre opérateur télécoms, même en marque blanche, nécessite quelques préalables pour un intégrateur réseaux. La Ficome (Fédération Interprofessionnelle de la Communication d'Entreprise ) prépare les intégrateurs à ce nouveau métier. Un atelier se tenait à ce sujet le 23 juin à Paris.
Pour les opérateurs télécoms, cette évolution du marché est d'un intérêt clair, car ils ont pour beaucoup les pires difficultés à atteindre un client PME en région et ils ont épuisé les charmes de la distribution indirecte classique. Passer par des opérateurs en marque blanche leur permettra de valoriser le partenaire et d'entrer chez les PME. Il leur assure aussi une concurrence locale contre OBS (Orange Business Service), ultra dominant dans les PME.
Côté intégrateur, l'activité d'opérateur va lui apporter un revenu récurrent. Et c'est bien ce qui l'intéresse dans son nouveau métier. Sur sa partie traditionnelle d'activité, celle d'installateur ou d'intégrateur, il a de plus en plus de mal à faire signer un client sur un contrat de maintenance pluri-annuel, alors que les interventions sont de moins en moins fréquentes. L'activité d'opérateur permet au contraire de « ré-engager » le client sur une période longue avec un revenu récurrent. L'intérêt de l'intégrateur est évident.
L'intégrateur devra toutefois veiller à s'entourer de plusieurs opérateurs, un principal et un ou deux opérateurs de deuxième rang « tier 2 ». Des opérateurs comme 720° ou Legos étaient présents à la réunion de la Ficome et correspondent à ce profil. Ne pas se lier à un seul opérateur est la précaution minimale pour un opérateur en marque blanche. « Aller progressivement sur cette activité nouvelle » est l'autre précaution de base, souligne Laurent Marchal, directeur général de la Business Unit télécoms chez etp-tetracom, un intégrateur francilien qui travaille en marque blanche avec SFR. «il n'est pas indispensable, du moins dans un premier temps, de s'équiper d'un softphone ou d'un process de facturation ».
Au bout du compte, les intégrateurs semblent donc arrivés à un moment décisif, où l'activité d'opérateur en marque blanche se développe vraiment. C'est le sentiment de la Ficome. Cette activité devrait même s'enrichir rapidement avec des offres en mobilité que les clients ne vont pas tarder à demander à leur opérateur-intégrateur.
Ceci dit, ce passage au métier d'opérateur est loin d'être un parcours banalisé. Avant tout, il faut se déclarer et obtenir une licence d'opérateur de télécoms auprès de l'Arcep, l'Autorité de régulation des télécoms. A partir de cette déclaration et de son enregistrement (n'importe qui ne peut pas devenir opérateur), l'intégrateur peut ouvrir une activité d'opérateur avec ses avantages et ses contraintes.
Les avantages sont techniques. Une fois déclaré comme opérateur, l'intégrateur a droit à ...
Illustration D.R.
... des SDA (numéros de téléphones publics), il peut s'interconnecter à d'autres opérateurs, bénéficier de droits de passage sur des réseaux publics. Il existe juridiquement et peut, par exemple, saisir l'Arcep sur un différent avec d'autres opérateurs.
En retour, il est soumis à des obligations. Par exemple, le paiement d'une taxe administrative selon le chiffre d'affaires généré en tant qu'opérateur. L'intégrateur doit donc, très en amont, prévenir son comptable interne et son expert comptable pour que la nouvelle activité soit bien isolée dans ses comptes.
L'opérateur se soumet également à une liste d'obligations techniques : disponibilité du réseau, sécurité des communications, respects de normes et de spécifications, acheminement des appels d'urgence (de grands opérateurs ont eu des déboires sur ce seul critère), conservation des données utilisées etc... Autant d'éléments à manier très en amont, avec beaucoup de professionnalisme, mais le jeu en vaut la chandelle. C'est le ton donné par a Ficome à ses ateliers « marque blanche ».
Une fois intégrées les contraintes juridiques et leurs implications techniques, le nouvel opérateur doit passer aux aspects métiers. Joël de François, directeur des activités « marque blanche » chez l'opérateur télécoms Bouygues Télécom a insisté, lors de l'atelier animé par la Ficome, sur la méthodologie commerciale nécessaire à un intégrateur pour passer au métier d'opérateur. Et de citer : l'analyse du parc (LAN, câblage...), celle de la facture existante, les compétences nouvelles à développer (avant vente, installation, traitement des incidents niveau 1).
Dans cet exercice, il faut beaucoup communiquer et sur des sujets inédits. Communiquer avec le client pour obtenir les informations techniques et montrer la nouvelle installation, définir un timing précis, désigner le responsable interne du déploiement, dialoguer avec celui chargé de suivre le projet chez l'opérateur. Reste alors à franchir l'étape du déploiement : dégroupage, paramétrage du routage IP, mise en place du routeur, activation du service.
Etape suivante : la facturation. « C'est le point le plus bloquant » précise Laurent Marchal. L'intégrateur-opérateur facture désormais un service d'opérateur au client, auparavant il facturait des produits à partir de catalogues fournisseurs.
C'est un changement total. Désormais, il doit récupérer les tickets de taxes et d'abonnement chez son (ou ses) opérateur, établir la consommation du client, décider de la période de facturation, générer la facture (seul ou de manière externalisée, par exemple avec une société comme Telesoft), donner un accès internet sur son site au gestionnaire du client final. Comme les parties juridique, technique et commerciale, cette partie facturation est totalement nouvelle et ne souffre pas d'improvisation.