Le projet d'extinction du cuivre semble mal parti
La Mission Champsaur vient de remettre son rapport à Fleur Pellerin, à sa demande, sur l'extinction du cuivre en France. Face au développement de la fibre, il va devenir rapidement risqué et hors de prix de maintenir deux réseaux sur le territoire national.
Selon le rapport réalisé par Paul Champsaur, ancien président de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Acerp), tant que le haut débit ADSL sera en place et restera performant, il sera difficile pour certains foyers et entreprises de réaliser la transition. Les collectivités la souhaitent et de manière rapide mais pour Orange, propriétaire de tout le réseau cuivre, la boucle locale est amortie et très rentable. Il n'est donc pas volontaire pour déclencher la dynamique de transition, les autres opérateurs non plus. A Free, on considère même qu' « aujourd'hui on ne réveille pas un abonné ADSL qui dort ».
Sur le même sujetDe plus en plus de français éligibles mais trop peu abonnés au très haut débitLe rapport amène quelques pistes, mais on est encore loin d'une solution pratique et consensuelle. En termes de modalités juridiques, les mécanismes sont encore flous : est-ce à l'opérateur historique de décider et d'organiser le démontage de son réseau ou à l'Etat de fixer ses modalités ? Le rapport se borne à lister les options. Il dessine néanmoins trois scénarios principaux et semble prendre parti pour le deuxième.
«Ce rapport est un catalogue»
Le premier ne fait pas ou peu intervenir les pouvoirs publics en faveur de l'extinction du réseau. Le deuxième est incitatif et préconise des actions publiques d'encouragement à la migration et les difficultés afférentes seraient traitées au cas par cas. Le troisième scénario, enfin, est plus volontariste en programmant un plan de clôture du réseau avec échéances de fin d'exploitation commerciale et technique et cahiers des charges stricts. « Ce rapport dresse plus un catalogue des difficultés à surmonter qu'il ne propose des pistes de solutions » nous explique Patrick Vuitton, délégué général de l'Avicca.
Plusieurs associations d'élus voient ce rapport d'un très mauvais oeil et l'ont exprimé à Fleur Pellerin. Yves Rome, président de l'Avicca, Gilles Quinquenel, président de la commission communication électronique de la FNCCR et président de Manche numérique sont inquiets de voir un projet dont les retombées économiques peuvent être bénéfiques pour toutes les régions se transformer en un dossier politique.
Entre les lignes du rapport on comprend que, pour Paul Champsaur, étant donne le taux de pénétration de la fibre qui n'est que de 17%, il est clair que les abonnés n'en veulent pas massivement. « La question porte plutôt sur l'accélération de la migration plutôt que sur l'extinction du réseau ». Difficulté supplémentaire, la position de l'Etat ne parait pas suffisamment claire, alors que la commercialisation des réseaux est déjà amorcée. « On ne peut pas laisser les opérateurs imposer leur rythme, il faut que l'Etat mette en place des mesures autoritaires pour atteindre les ambitions du plan France Très Haut Débit. Cela passe par exemple par une régulation des tarifs, des mesures fiscales, ou encore une indemnisation des opérateurs ».
en photo : Yves Rome, Président de l'Avicca avec Fleur Pellerin, Ministre du numérique