Le Gouvernement opposé au rachat de Bouygues Télécom par Altice (MàJ)
Emmanuel Macron s'est montré fermement opposé dimanche à un possible rachat de Bouygues Télécom par Altice. Ce projet remet également en cause la procédure d'enchères sur la bande 700 MHz engagée vendredi et pose des questions de concurrence. (mise à jour de notre article rédigé dimanche).
Il y a un an, Free offrait 6 milliards d'euros pour racheter Bouygues Télécom (11,1 millions d'abonnés mobiles, 2,4 dans le fixe). Selon nos confrères du JDD et du Wall Street Journal, Altice mettrait 10 milliards d'euros sur la table, il en avait proposé 7, six mois auparavant. Bouygues Télécom qui se veut indépendant et investit depuis des mois dans des offres fixe aurait laissé finement monter les enchères. Le JDD affirme que Martin Bouygues cèderait à 11 milliards (*), un conseil d'administration se réunit ce mardi chez Bouygues.
Sur le même sujetBouygues Télécoms lance une offre fixe, mais par la 4G, pour les entreprisesLe groupe de BTP a confirmé lundi avoir reçu une offre de SFR-Numericable pour sa filiale télécoms. Free de son côté a précisé discuter avec SFR-Numericable pour s'associer à son projet de rachat. Orange en revanche reste muet (un porte-parole a démenti sa participation au projet, dimanche après-midi). L'Etat détenant, avec la BPI, 26% de son capital et s'étant montré dès dimanche hostile au projet, la direction d'Orange a du mal à affirmer une position publique.
Orange en porte-à-faux
Mardi dernier à l'Idate, Stéphane Richard, PDG d'Orange, confirmait son souhait de passer de 4 à 3 opérateurs. Bruxelles se montrait la veille opposé à une telle hypothèse et Emmanuel Macron à son tour rappelle son hostilité à une telle concentration. "Je dis et répète que la consolidation n'est pas aujourd'hui souhaitable pour le secteur", a déclaré Emmanuel Macron, dans une déclaration transmise à Reuters. "Que chacun se concentre sur les engagements pris en matière d'investissement, sur l'innovation, sur l'attribution imminente de la bande 700 MHz et sur les opérations", poursuit Emmanuel Macron. "Le temps n'est pas à des rapprochements opportunistes auxquels plusieurs peuvent trouver un intérêt qui ne retrouve pas ici l'intérêt général." Le ministre a pris l'habitude de réunir les opérateurs pour les inciter en particulier à investir sur le haut débit, il les voit à nouveau le 16 juillet prochain.
Un pré-accord avec Free et Orange ?
Au-delà, un rachat de Bouygues Télécom aurait des conséquences en matière de concurrence. Altice aurait prévu l'objection en négociant avec Orange et Free, le premier reprenant des salariés de Bouygues Télécom, le deuxième des fréquences, des antennes et des boutiques.
L'autre question est financière. Altice porte déjà 32 milliards de dettes. Ce serait 10 ou 11 de plus (**). Le JDD affirme que BNP Paribas a accordé ce nouvel emprunt à Altice qui a racheté en un an SFR, Portugal Télécom et Suddenlink Communications (câblo-opérateur américain). L'argent étant peu cher, Altice n'aurait aucune difficulté à lever des fonds et se rémunèrera sur les synergies entre ses différentes acquisitions.
(*) Ce serait plus que la capitalisation boursière du seul groupe Bouygues, donc Martin Bouygues ferait une excellente affaire. Prochaine devinette : que ferait-il d'une telle somme ?
(**) Pour donner un ordre d'idées, ce serait plus que le CA annuel d'Orange, 39,4 milliards d'euros en 2014.
En illustration : Patrick Drahi et son directeur général Dexter Goei