La polémique continue après le vote de la loi Hadopi
Quelques heures seulement après que les députés ont déroulé le tapis rouge au projet de loi favorisant la diffusion et la protection de la création sur Internet, dit Création et Internet, ou encore Hadopi, les réactions fusent de toutes parts. Dans l'ensemble, les observateurs s'émeuvent de l'esprit du texte et des conséquences pratiques qu'il risque d'entraîner s'il était appliqué. Fer de lance de l'opposition, la Quadrature du Net décrit la loi comme un « monstre » enfanté par des députés « aux ordres ». L'association ne se fait guère d'illusion sur le texte de compromis que rendra, le 9 avril, la commission mixte paritaire et reporte ses espoirs sur l'examen qu'en fera le Conseil constitutionnel. Il s'agira de « l'épreuve du feu pour un texte imprécis, absurde, dangereux et totalement inapplicable ». Par ailleurs, la Quadrature ne se prive pas d'égratigner la majorité et de mettre en lumière son « ignorance technologique » ainsi que sa dévotion à « un corporatisme aveugle ». Une loi jugée inapplicable par l'association de défense du Libre L'inapplicabilité de la loi est un reproche souvent formulé par les députés de l'opposition et également repris par l'April. L'association de défense du Libre déplore l'instauration « de nouvelles discriminations contre le logiciel libre » par le texte voté hier. Notamment parce qu'il refuse « tout encadrement des mouchards filtrants que les abonnés devront installer pour garantir leur sécurité juridique ». Rappelons que les internautes pourront être sanctionnés pour le manquement à l'obligation de sécurisation de leur accès Internet. S'ils veulent se mettre à l'abri de cette infraction, ils pourront installer un pare-feu labellisé par l'Hadopi. L'April dénonce, à ce propos, l'absence dans la loi de « toute mesure favorable à l'interopérabilité et à la libre concurrence ». Au final, les défenseurs du Libre sont consternés face à Création et Internet « qui contient des dispositions qu'il était impensable de voir écrites un jour noir sur blanc tant elles sont extrémistes ». FFT et Snep plutôt bienveillants Si la Fédération française des télécoms s'emporte également contre le texte, elle ne reprend pas les reproches adressés par les deux acteurs précédents. La FFT point en revanche que les personnes sanctionnées n'auront plus à acquitter le montant de leur abonnement lorsque leur connexion sera suspendue. « Si une telle disposition était maintenue dans la loi, cela signifierait tout simplement la fin du modèle économique des offres composites qui a permis le succès du haut débit en France ». La fédération explique que « les coûts de gestion significativement supérieures des internautes dont l'accès à Internet aura été suspendu » l'obligeront à se tourner « très légitimement vers les pouvoirs publics » afin qu'ils les prennent à leur charge. Du côté des industriels de la culture, le ton est naturellement bienveillant. Le Snep (Syndicat national de l'édition phonographique) exprime son contentement devant l'adoption d'une « règle du jeu [qui permettra] de sensibiliser les internautes à l'usage des accès légaux à la musique, ouvrant ainsi la voie au développement des nouveaux modèles et des nouvelles offres jusque là empêché par la concurrence déloyale des échanges peer-to-peer ». Alors que l'April et la Quadrature ont adressé leurs louanges aux députés Billard, Bloche, Brad, Dionis du Séjour, Paul et Tardy - contempteurs du projet de loi -, le Snep se veut le laudateur de Christine Albanel et de Franck Riester - le rapporteur du texte -, félicités pour leur détermination.