La Geek Generation déferle en MP3...
... ou lorsque la cryptographie se marie avec le rap et se diffuse en numérique. MC ++ et les Empty Set qui sortent un CD intitulé « Algorhythms » , DJ Ytcracker et les Spamtec qui diffusent « hors bacs » l'album « STC is the Greatest », DJ Frontalot qui arrose la sortie de son tour premier album NerdCore Rising . De MySpace aux ftp fouillis truffés de musique chahutée et gratuite, en passant par les repository sauvages situés sur les ressources des universités de Purdue ou de Yale, le rap Geek se fait connaître. Et l'on est loin des balbutiements de la première heure, ces petits morceaux de bravoure qui maniaient un humour gaulois et une autodérision « de bon ton ». Non, ici, on n'a pas honte de sa geekitude et de l'informatique, et l'on prouve que la musique qui a du nerd ne se contente pas de plaquer des paroles comiques sur une vieille chanson de Franju. Les sampling sont très « sixties », et résonne, çà et là, du Nancy Sinatra, du Paul Simon ou les échos des Birds... avant que tout parte en vrille, se transforme en « protest song ». Il y a de la hargne là dedans, de l'humour... et pas un milligramme d'alibi. Lorsque le chanteur parle de « triple DES », ce n'est pas pour « meubler » un mauvais dialogue de science fiction. Il suffit d'écouter « Alice and Bob ». On y cause même de « Ol' Bruce Schneier », c'est dire ! Le Spam, le hip hop du Scam nigérians, les hacks noirs, la mainmise de Microsoft, la complicité passive d'AOL, les virus, le code... D'accord, certains gimmicks sont réservés aux initiés et le langage frise souvent l'abstrus, mais le vocabulaire des gangsta de SoCal n'est guère plus compréhensible parfois. Les numéros de plage musicales inscrits en binaires, les références au langage C, les jeux de mots convenus sur le phishing et le crack qui ne se fume pas, c'est tout çà, le folklore de la Silicon Valley New Beat. Avec moins de costumes-cravates qu'au temps de la bulle qui gonfle, qui gonfle, un peu plus de casquettes publicitaires « Sun » ou « Google », du sweatshirt XXL et des Nike délacées. Une sacro-sainte basket-godasse-signe-de-ralliement qui est à la musique américaine ce que « Maréchal nous voilà » et la « Marche du Sport » * est au belcanto français. Dans les années 40, sur la cote Ouest, c'était encore des porteurs de baskets - Spike Jones et ses City Slickers - qui faisaient déjà swinguer la jeune génération.
*André Dassary, la « voix d'or » de Ramuncho qui se perdit un peu durant les années d'occupation.