La Commission européenne peine à réduire de 4 à 3 le nombre d'opérateurs mobiles

le 02/07/2014, par Didier Barathon, Opérateurs/FAI, 978 mots

Plusieurs pays d'Europe souhaitent réduire le nombre de leurs opérateurs mobiles, après avoir tout fait pour qu'ils soient au nombre de 4, ils veulent les ramener à 3. La Commission euro-péenne allonge la durée d'examen de ces dossiers après s'être largement contredite sur le su-jet.

La Commission européenne peine à réduire de 4 à 3 le nombre d'opérateurs mobiles

C'est une décision attendue depuis des mois, l'Union européenne vient d'approuver le rachat par Telefonica Deutschland (filiale de l'opérateur historique espagnol en Allemagne) de la filiale allemande nommée E-Plus de KPN (opérateur historique hollandais). Cette décision a été annoncée par Joaquim Almunia (en photo), le Commissaire européen sortant chargé de la concurrence.  Une personnalité qui jusqu'alors a toujours plaidé et agi pour plus de concurrence et plus d'acteurs, en particulier dans les télécoms. 

Sa décision encourage la réduction du nombre d'opérateurs mobiles partout en Europe, où ré-gnait jusqu'alors, par l'attribution de licences nouvelles l'extension de la concurrence, comme en France avec l'arrivée de Free Mobile il y a  deux ans et demi. Curieusement, les pays euro-péens et la Commission avaient fait du chiffre « 4 » un objectif magique, ils semblent pour la plupart faire de même avec le chiffre de « 3 » opérateurs.

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Le rapprochement conclu en Allemagne permettra par la combinaison de E-Plus et de Telefonica Deutschland de créer un opérateur mobile fort de 31% de parts de marché. Les deux concurrents sont deux autres géants européens, T-Mobile évidemment, filiale de l'opérateur historique local Deutsche Telekom et Vodafone. Les trois ont des parts de marché équivalentes. Le souci principal de Joaquim Almunia et de ses services est de ne pas figer cette situation au détriment des consommateurs.

L'accord est d'ailleurs conditionnel. Telefonica s'est engagé à louer 30% de la capacité réseau du nouvel opérateur issu de la fusion à des MVNO, il va également céder une partie de son spectre d'ondes radio. L'espagnol doit étendre ses accords de grossiste et offrir le haut débit mobile 4G à toute entreprise qui souhaitera ce type de services. De telles mesures, assure la Commission européenne, permettront à trois MVNO de prendre place sur le marché allemand de la téléphonie mobile, une avancée intéressante, ces opérateurs ciblant les jeunes et les populations immigrées, étendront donc le spectre commercial de la mobilité. Telefonica a d'ailleurs déjà signé avec Drillisch pour 5 ans via la filiale MS service mobile de cet opérateur. L'opérateur espagnol a fait ces concessions avec célérité, la Commission lui ayant adressé fin février une « communication de griefs » qui listait les conditions mises par Bruxelles à ce rapprochement. Mais la Commission elle-même s'adresse des griefs !

L'Allemagne donne le « là »

Joaquim Almunia voulait s'assurer, après un examen très poussé du dossier, que la fusion ne nuirait pas aux consommateurs allemands qui payent déjà des tarifs élevés. Il a examiné cette fusion avec d'autant plus de scrupules qu'elle donne le « là » à la consolidation en Europe. Les opérateurs ne pouvant à la fois continuer à investir dans leurs réseaux fixes et mobiles et soutenir la concurrence. La Commission elle-même jusqu'alors très portée à favoriser de manière draconienne l'ouverture à la concurrence fait machine arrière. Elle prend en compte à la fois la dégradation des comptes des opérateurs en place et le fait qu'une centaine d'opérateurs mobiles agissent en Europe contre 4 aux Etats-Unis, ce qui conduit sur le vieux continent à une guerre des prix, à la destructrice des emplois et de la qualité de services. Globalement, elle estime que les opérateurs ne sont plus assez solides et n'ont pas la taille suffisante pour se développer.

Toutefois, la Commission a évolué sur le sujet et s'est même trompée. Cette réduction du nombre d'opérateurs s'est mal passée en Autriche, reconnaît Joaquim Almunia. La situation s'est éclaircie fin 2012, début 2013. France Télécom  a décidé de vendre ses parts dans Orange Austria dont elle détenait 35% aux côtés de Mid Europa Partners qui possédait le reste. Les deux partenaires ont trouvé preneur en la personne de Hutchison Whampoa, le groupe de Hong Kong.

La Commission européenne avait autorisé cette vente début décembre 2012. Elle a entraîné le passage de 4 à 3 opérateurs en Autriche, le marché local dans les mobiles est détenu désormais par A1, filiale de l'opérateur historique Telekom Austria, T-Mobile, filiale de Deutsche Telekom et donc Hutchison qui même en fusionnant les 3è et 4è n'est que 3è. A noter que Hutchison a dû vendre à A1 des fréquences, des droits de propriété intellectuelle et la filiale low cost de Orange Austria : Yess, pour satisfaire aux demandes de Bruxelles. Visiblement cela n'a pas suffi pour garder une concurrence saine. Les trois opérateurs en place ont fait monter les prix. Un an plus tard, le prix moyen des forfaits avait bondi de 6%.

Bruxelles reconnaît son erreur

Le Commissaire européen s'est montré insatisfait de cette situation et a reconnu une erreur de ses services qui n'ont pas, en Autriche, posé de conditions suffisantes pour  la réduction du nombre d'opérateurs. L'erreur est donc réparée, puisque dans le cas allemand Telefonica a veillé scrupuleusement  à respecter les souhaits de Bruxelles. Ce dossier allemand va désormais servir de référence partout en Europe.

On retrouve les mêmes acteurs dans l'autre grand dossier de la recomposition en Europe, l'Irlande. Telefonica a vendu sa filiale 02 justement à Hutchison, plus précisément sa filiale 3 Ireland (qui se fait appeler Three ou Free). Bruxelles s'était d'abord opposé à ce dossier avant de l'approuver au mois de mai. 3 Ireland s'est également engagé à accueillir des MVNO, deux en l'occurrence et à céder des fréquences.

Mais Hutchison Whampoa a échoué il y a un an pour entrer au capital de Télécom Italia. La recomposition est donc loin d'être facilitée en Europe. Du fait de l'opposition des gouvernements à toute intrusion étrangère comme en Italie et en France, mais aussi pour des raisons règlementaires comme la Commission européenne l'a montrée dans ses dernières décisions. Désormais, après l'Autriche, l'Irlande et l'Allemagne, elle semble avoir défini les conditions mises à l'approbation d'un rachat. La consolidation peut se mettre en route, encore faut-il des acquéreurs potentiels. 

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