L'affaire Michel Combes : Proxinvest songe à porter plainte auprès de l'AMF
Une fois de plus, les rémunérations d'un dirigeant d'entreprise provoquent des polémiques. Le départ de Michel Combes d'Alcatel-Lucent s'ajoute à d'autres affaires où l'on retrouve les mêmes ingrédients.
Défenseur de la transparence et des actionnaires, Pierre-Henri Leroy, fondateur du cabinet indépendant Proxinvest n'a pas sa langue dans sa poche. Pour faire son métier, il ne craint pas de parler clair, même s'il apprécie Michel Combes à titre personnel. Principal axe de son argumentation, le mensonge. S'il est avéré, il peut entraîner une plainte de son cabinet auprès de l'AMF sur les conditions de rémunération du Pdg sortant d'Alcatel-Lucent. Même si cet organisme est qualifié de « mou du genou » une plainte pourrait avoir son effet.
Michel Combes quitte en effet l'équipementier, pour rejoindre Altice et Numericable-SFR ce soir avec de larges compensations financières, que révélait hier le Journal du Dimanche (JDD). Révélait, mais à partir de documents tout à fait officiels d'Alcatel-Lucent : une clause de non concurrence de 4,5 millions d'euros, un million en stock-options et 8,2 millions d'actions vendables entre 2016 et 2018. Au départ, cette dernière possibilité lui était interdite puisqu'il faut trois ans de présence dans l'entreprise pour en bénéficier. Mais cette clause a été levée pour tous les collaborateurs en avril après le rachat par Nokia explique la direction de l'équipementier. Le JDD pour sa part assure que c'est un conseil d'administration qui en a décidé ainsi pour son directeur général le 29 juillet dernier. S'il y a eu mensonge, à un moment ou à un autre sur ces différents modes de rémunération, la plainte serait fondée.
La réplique de Michel Combes
Michel Combes et Philippe Camus, Président du conseil d'administration qui va lui succéder également à la direction générale, expliquent qu'aucune règle n'a été modifiée, mais que la polémique vient de l'action, à moins d'un euro lors de l'arrivée de Michel Combes et aujourd'hui multipliée par quatre. Ce qui prouve simplement, à leurs yeux, que Michel Combes a sauvé l'entreprise. Le Pdg sortant, avait également annoncé renoncer à son parachute doré de 2,4 ME, donc à toute indemnité de départ, se « contentant » de la valorisation des actions.
Lors de son engagement en 2012, il était indiqué que Michel Combes toucherait 1,2 million d'euros en fixe, le reste en variable, ce variable représentant un maximum de 200% de la rémunération fixe, au total Michel Combes pouvait donc gagner 3,6 ME par an. Son fixe était plus important dans son précédent poste chez Vodafone.
Des banques trop dominantes
Au-delà du cas de Michel Combes et de l'entreprise qu'il quitte, cette affaire fait souvent flores en France. « Les administrateurs ne défendent pas suffisamment les actionnaires, estime Pierre-Henry Leroy, qui souligne les effets néfastes des conflits d'intérêt et du rôle de la banque universelle en France encouragée par l'Etat et dominant les conseils des entreprises. Les administrateurs « achètent » les dirigeants par de fortes rémunérations ou compléments de rémunération.
Alcatel-Lucent pour sa part indique sur son site adhérer au Code AFEP-MEDEF de Gouvernement d'Entreprise des Sociétés Cotées. De quel effet est ce code ? Le Medef ce lundi matin assure vouloir se pencher sur l'affaire Michel Combes. Mais ce n'est que la suite d'autres affaires semblables. Un exemple. Le Président du comité des rémunérations d'Alcatel-Lucent n'est autre que Jean-Cyril Spinetta qui bénéficie d'une retraite à vie de 350 à 400 000 euros depuis 2009, au titre de son passage comme Pdg d'Air France, entreprise qui connait des plans successifs de redressement.
En photo : Michel Combes estime justifiée ses compléments de rémunération, car il a multiplié la valeur de l'action par quatre en deus ans.