Galileo, 2,4 Milliards d'€ d'un coup
Un problème -certains disent cancer- semble frapper strictement de la même manière le projet de positionnement satellite Galileo. Ce concurrent du GPS vient, une fois de plus, de voir sa date butoir de financement repoussée à décembre prochain. Cette fois, la Commission Européenne doit trouver 2,4 milliards d'Euros supplémentaires pour relancer le projet, et tenter d'apaiser la guéguerre qui oppose le gouvernement Allemand et la France. Un affrontement qui ne repose que sur de sordides problèmes d'intérêts et de zone d'influence opposant notamment EADS et l'industrie d'Outre Rhin, ainsi que dans la « course à la technologie spatiale » qui déchire les deux pays. La presse audio-télévisée parle de « la création de centaines, voir de milliers d'emplois en rapport avec le développement des appareils GPS dans le secteur automobile »... Il s'agit bien de cela. Peut-on réduire un tel projet à l'usage d'une carte pour promeneurs du dimanche ? Si cela était véritablement le cas, l'infrastructure américaine GPS suffirait amplement. Après tout, même aux USA, 99% des récepteurs de positionnement sont estampillés « made in Corea » ou « made in Japan ». Les intérêts sont ailleurs et d'ordres purement stratégiques. - Militaires, tout d'abord. Pour des raisons trop évidentes pour avoir à les expliquer. La politique atlantiste d'aujourd'hui n'est probablement qu'un épiphénomène, et la plus élémentaire des prudences exige que l'on ne dépende pas d'un « pays allié » dont l'amitié n'est faite que d'intérêts diplomatiques et de déséquilibre des échanges extérieurs. - Civils ensuite, car une infrastructure de géopositionnement européenne garanti la pérennité des infrastructures secondaires de tout ce qui touche aux communications. Aériennes, bien entendu, mais également routières -l'on parle ici de flottes entières, et non de trajets Paris-la Garenne Bezons- et télécoms. Car on ne peut sérieusement envisager le développement de réseaux à la fois mobiles et cognitifs sans l'épanouissement d'une cartographie temps-réel des noeuds de transmission ? La civilisation européenne, après 2000 ans d'histoire, a appris le prix et l'importance des efforts étatiques. De l'entretien de la Via Apia à la construction de l'axe ferroviaire PLM, les différents gouvernements qui constituent l'Europe ont toujours su prendre en charge les coûts des voies de communication. Ceux qui ont échoué en ce domaine -ainsi l'ex URSS- se sont rapidement effondrés. Ou se sont effondrés précisément à partir du moment où ces voies de communication se sont avérées inefficaces. Cela risque d'arriver au système Galileo si l'on perd de vue un léger détail : les intérêts privés, même de très grandes multinationales, ne « pensent » ni avec une perspective historique, ni avec une stratégie communautaire. Leurs investissements dans un tel projet ne seront qu'à la hauteur de leurs ambitions : limités au développement d'une seule et unique entreprise, pour le plus grand bien d'une stratégie financière.