Free doit cesser d'exclure certains numéros de ses forfaits illimités
Le 25 novembre, l'Arcep a rendu publique sa décision de mise en demeure de Free afin que l'opérateur cesse ses pratiques d'exclusion de certains numéros de téléphone de ses forfaits illimités. La décision date du 23 novembre. Free doit cesser d'exclure certains numéros géographiques (01 à 05) ou non géographiques (09) de ses forfaits illimités. Les appels vers ces numéros sont actuellement facturés hors forfait.
Free avait reconnu cette pratique et indiqué exclure près de 500 numéros correspondant à des services ou à des interlocuteurs divers. Free précise qu'il annonce depuis octobre en début d'appel, au client l'existence d'un traitement tarifaire spécifique. Cette annonce ne précise cependant pas le tarif appliqué. La liste des numéros exclus est publiée dans son espace client sur internet.
La méthode et les critères d'exclusion appliqués par Free conduisent à exclure des numéros menant à des contenus ou des interlocuteurs divers. Au-delà de nombreux services de carteurs (pour des appels téléphoniques à coût réduit vers certaines destinations spécifiques) ou de services adultes, de nombreux services clients sont concernés tels ceux des sociétés Ikea, Darty, Bouygues Telecom, NRJ mobile, Sofinco, Samsung, MACIF, MSA protection sociale de monde agricole et rural ou la Mutuelle des hospitaliers.
L'Arcep relève le manque de cohérence des critères appliqués par Free. Ainsi, à titre d'exemple, deux services de banques en ligne exploitant des numéros fixes géographiques ne sont pas traités de manière homogène par Free. Un appel au numéro de Boursorama (01 46 09 49 49) est exclu de l'offre illimitée de Free alors qu'un appel au numéro de Crédit Agricole Paris Direct (01 44 73 19 19) ne l'est pas. Autre cas, l'opérateur NRJ mobile voit son numéro d'accès client (09 69 36 02 00) exclu de l'offre illimitée de Free, tandis que celui d'un autre opérateur mobile Transatel (01 70 75 24 00) est inclus.
Finalement, pour l'Arcep, malgré l'amélioration amenée par l'annonce en début d'appel, il y a toujours une insuffisance d'information des utilisateurs en ce qui concerne le périmètre du forfait et surtout en ce qui concerne les tarifs des services offerts par l'opérateur. La liste des numéros exclus est susceptible d'être mise à jour à tout moment, à chaque nouvelle exclusion ou réintégration de numéro. En théorie, l'utilisateur final devrait donc consulter cette liste lors de chaque nouvel appel car il n'est pas prévenu qu'un numéro déjà appelé a été réintégré.
L'offre à laquelle il a souscrit peut avoir vu son périmètre de service téléphonique significativement modifié. La liste des numéros exclus pouvant évoluer à tout moment, les abonnés au service téléphonique Freebox perdent la prévisibilité minimale sur le montant de leurs futures factures. Les exclusions sont fréquentes, nombreuses (plus de 500 numéros exclus à cette date), variables avec le temps et non prévisibles, tant pour les abonnés appelant ces numéros que pour les appelés.
Au-delà ce défaut d'information, l'Arcep liste les critères appliqués par Free pour appliquer une tarification différente à des appels vers certains numéros. Il s'agit de considérations relatives à la nature du message ou à la qualité des appelés : machine ou humain, centre d'appels, fourniture d'informations ou conversation, caractère professionnel ou personnel.
Plus précisément, Free avait indiqué qu'il excluait "les numéros ...
... courts, spéciaux, surtaxés ou support de services autres que de communications interpersonnelles tels que centres d'appels, serveurs d'informations vocales, plateformes de re-routage de communications téléphoniques ainsi que services se rémunérant directement ou indirectement par la durée des appels passés par l'Abonné."
Conséquence, les utilisateurs affectataires de numéros fixes géographiques ou non géographiques connaissent une incertitude sur la manière dont sera qualifié leur numéro dans les offres de Free. L'Arcep souligne que cela est en particulier vrai pour les entreprises, notamment pour des services visant l'exécution de la relation contractuelle, par exemple le service après-vente. Pour ces entreprises, les pratiques de Free peuvent avoir pour effet que les appels vers leurs numéros sont bloqués ou finalement surtaxés, au détriment du service rendu et de leur image,en porte-à-faux par rapport à leurs obligations de joignabilité issues des lois Chatel et LME,et sans possibilité de réaction rapide ou de recours de leur part. Ainsi les abonnés de Free sont confrontés à une incohérence en matière d'information tarifaire sur des numéros géographiques ou non géographiques annoncés comme « non surtaxés » par leurs affectataires et dont les appels sont, dans la pratique, facturés en suppléments de leur forfait par Free.
Free indique accepter dans ses forfaits la prise en compte des appels "interpersonnel" dont il exclut notamment les communications « réalisées dans le cadre d'un service à valeur ajoutée » et cite en exemple « les appels vers des plates-formes de service (service d'information, conversationnel, jeux, adultes, passerelles de reroutage d'appels par carte ou non) accessibles au moyen de numéros dédiés géographiques, mobiles et nongéographiques ».
Pour l'Arcep, cette définition apparaît discutable, en ce qu'elle repose sur une appréciation subjective et qu'elle ne permet pas aux utilisateurs appelants ou appelés de connaître ou de prévoir avec certitude et précision les numéros exclus. De nombreux exemples de services sont susceptibles de satisfaire à la définition théorique mentionnée dans les conditions contractuelles.
A titre d'illustration : le serveur vocal interactif d'un hôpital permettant de router l'appel directement vers la chambre d'un patient grâce à un dispositif de reconnaissance vocale de son nom ; les centres d'appels d'entreprises ou d'administrations ; le standard de n'importe quelle entreprise qui route l'appel vers le poste du correspondant souhaité ; le service d'accueil téléphonique auquel certaines professions médicales confient la gestion de leurs appels entrant pour ne pas être dérangé en consultation.
L'autorité considère que cela entraîne une discrimination entre des utilisateurs placés dans des situations similaires, sans justification objective. Il s'agit de manquements aux principes de transparence et de neutralité prévus par le code des postes et des communications électroniques, pour l'Arcep. Il y a donc une mise en demeure de Free afin que cette pratique cesse avant le 7 janvier 2011.
Photo : Xavier Niel, emblématique dirigeant de Free, le trublion de l'internet