Fibre Optique : Free s'énerve face à Orange mais s'entend avec SFR

le 06/07/2009, par Vivien Derest, Régulation télécoms, 998 mots

Orange, SFR, et Free participaient à une table ronde le 3 juillet organisée par les Échos sur le thème de la fibre optique. A l'heure où Orange annonce geler ses investissements dans ce domaine, l'événement a été l'occasion d'échanger autour de projets communs mais surtout de se lancer quelques piques bien senties.

« On veut faire de la fibre. On ne veut pas profiter de notre position historique, et on veut de la concurrence, pour éviter de replonger dans la régulation. », annonçait Orange par l'intermédiaire de Eric Debroeck, Directeur des affaires réglementaires, lors d'une table ronde organisée par Les Echos, vendredi dernier. Pourtant, l'opérateur historique a décidé de geler ses investissements en fibre optique suite à la récente (non) décision de l'Arcep sur la fibre dans les immeubles. Des épisodes agités Jérémie Manigne, directeur du programme Fibre chez SFR, Maxime Lombardini, directeur général d'Iliad/Free et Eric Debroeck, directeur des affaires réglementaires d'Orange sont revenus sur l'état de la fibre optique. La table ronde a alterné généralités et épisodes bien plus agités. Qu'on en juge : Maxime Lombardini a accusé Eric Debroeck - qui il faut le reconnaître venait de lire longuement sa présentation de l'historique de la fibre optique vu par France Télécom sans être interrompu - de « dire des contre-vérités pendant 20 minutes. On peut pas laisser faire même si ça me vaut encore une plainte en diffamation. » L'Arcep a choisi le modèle de la fibre surnuméraire Pour rappel, l'Arcep a récemment laissé aux propriétaires la possibilité de choisir un opérateur d'immeuble pour la fibre optique. Mais celui-ci étant obligé d'installer au moins un réseau supplémentaire à la demande d'un autre opérateur désirant une fibre supplémentaire, c'est implicitement le choix de la fibre surnuméraire qui a été fait. Une décision qui a entrainé un gel des investissement en fibre optique de la part de France Télécom. Le gel d'Orange n'inquiète pas Free Un gel annoncé par France Télécom qui ne semble pas inquiéter Maxime Lombardini : « Nous continuons. Nous avons de plus maintenant accès aux fourreaux. Nous accélérons ». SFR poursuit aussi son installation: « On a plusieurs années de retard sur France Télécom, car on avait pas les mains libres. Maintenant on peut enfin commencer à s'installer. Mais on est obligé de faire avec le réseau pré-existant. » Le monofibre mutualisé moins coûteux Mais si France Télécom déclare « vouloir faire de la fibre », d'où vient ce gel ? Le monofibre mutualisé est moins coûteux (740 millions d'économie pour les 8 premiers millions de logements), explique Eric Debroeck, qui précise qu'Orange évalue « un surcoût de 40 % par immeuble pour la fibre surnuméraire par rapport au monofibre ». De plus, le multifibre empêche de revenir au monofibre, et Orange s'est engagé dans le monofibre et risque des procès en continuant dans cette direction. Le surnuméraire payé par ceux qui ne le voulaient pas D'un point de vue coûts, France Télécom s'estime aussi lésé : « Au début, les responsables du surnuméraire devaient payer les coûts liés. Maintenant, c'est partagé. Sauf que ceux qui veulent du mutualisé doivent payer le boitier de brassage. Au final, ce sont ceux qui ne voulaient pas de surnuméraire qui le subventionnent pour les autres. », conclut Eric Debroeck, justifiant ainsi le choix d'Orange de geler les investissements. France Telecom dit n'importe quoi, selon Free Ce sont des justifications qui ne tiennent pas la route, selon Maxime Lombardini :«  France Telecom dit n'importe quoi. 40 % de surcoût [pour le surnuméraire], c'est une blague ». Pour mémoire, ce surcoût est estimé à 10 % par Iliad, et à 5 % par l'Arcep.« De plus, le surnuméraire, ça permet à chacun d'avoir sa technologie, de ne pas avoir besoin de France Télécom dès qu'un abonné veut changer. Ça vous embête peut-être, mais ça ne vous coûte rien. », continue Maxime Lombardini. Co-investir mais pas avec l'opérateur historique D'un point de vue des déploiements, c'est une solution de partage des coûts que propose Maxime Lombardini, déclarant que « la concurrence, c'est bien en période de croissance. Mais en temps de crise, un investissement commun, mutualisé, ne serait-il pas meilleur ? Plus rapide ? Plus efficace ? ». Une position suivie par Jérémie Manigne de SFR, qui déclare que SFR est « prêt à co-investir. Mais on ne veut pas que des gens qui ont un avantage historique ou technique en profitent. » Orange aux abonnés absents Mais si Iliad et SFR semblent d'accord, qu'en est-il d'Orange ? « Il n'y a pas de réponse à nos courriers pour discuter sur les coûts quand on écrit à FT. », souligne Maxime Lombardini. Et en ce qui concerne le nombre de foyers fibrables par France Télécom :« France Télécom ne répond jamais, c'est sa stratégie. » FT ne répond pas SFR propose que dans les zones où France Télécom n'a pas encore déployé, les points de mutualisation soient installés en dehors des propriétés privées. Mais quand il s'agit de savoir quelles sont ces zones, Jérémie Manigne de SFR regrette : « On ne sait pas, France Télécom ne le dit pas ». Un silence chronique de la part de France Télécom qui semble donc être au coeur de toutes les critiques de SFR et de Free. Le cuivre paie pour l'optique Quant à la proposition de Guillaume de Calignon, journaliste des Echos, qui relaye l'idée anglaise de taxation du cuivre pour financer la fibre optique, c'est Jérémie Manigne qui y répond : « Cette taxe, on la paye déjà il me semble, sous le nom 'Renouvellement du réseau'. On devrait même la déduire de notre participation à la fibre optique. » Différents modèles de financement de l'optique « J'espère que les débats que nous voyons aujourd'hui seront un signe de dynamisme. », conclut Gabrielle Gauthey, Directrice des relations institutionnelles chez Alcatel Lucent, et il y a encore peu membre du conseil de l'Arcep en charge de la régulation de la fibre optique, rappelant qu'il n'y a de toute façon pas de méthode unique en matière de fibre. Selon les États, les régulations sont différentes, les installations se font parfois à la charge des opérateurs, parfois à celle de la copropriété, et parfois les opérateurs n'ont pas besoin d'autorisation de la copropriété pour venir installer la fibre. Affaire à suivre.

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