Fibre optique dans les immeubles : les pouvoirs publics repoussent encore les décisions
Mardi 7 avril s'est tenue une réunion qui a rassemblé pouvoirs publics et opérateurs. Suite aux expérimentations de câblage des immeubles lancées par FT, SFR et Iliad, il s'agissait d'adopter un modèle de mutualisation (ou pas) du réseau de fibre optique dans les immeubles. Mais la décision a été encore repoussée de trois mois.
Ne surtout pas brusquer France Télécom. Telle semblait être la ligne de conduite que s'étaient fixés les pouvoirs publics (le gouvernement et l'Arcep) à l'issue de la réunion de la « task-force » fibre, qui se tenait, mardi 7 avril dernier, au secrétariat d'Etat à l'économie numérique. Au menu de la réunion : faire le point sur les expérimentations de câblage des immeubles lancées en début d'année. Un seul ou plusieurs réseaux montants vers les immeubles : trois mois supplémentaires pour trancher Pour tenter de rapprocher les positions a priori inconciliables de France Télécom et d'Iliad, le gouvernement et l'Arcep avaient en effet décidé, en fin d'année dernière, d'autoriser les opérateurs à procéder à quelques déploiements verticaux : France Télécom (rejoint par SFR et Numéricâble) est partisan de la pose d'un seul réseau montant dans les immeubles avec en pied d'immeuble la mise en place d'un boîtier de connexion permettant à tous les opérateurs de se raccorder ; Iliad veut généraliser la pose de plusieurs réseaux montants permettant, aux opérateurs qui le souhaitent (comme lui) de se raccorder directement à l'un de ces réseaux sans passer par l'équipement de raccordement. Au moment du lancement des expérimentations, on avait pu comprendre qu'un bilan serait fait au bout de trois mois et que des décisions seraient alors prises pour décider du modèle qui s'imposerait ensuite à tous les opérateurs. En fait, il n'en a rien été, les pouvoirs publics se donnant trois mois supplémentaires avant de trancher. Entre-temps, deux mesures sont prises. Pour « libérer l'investissement » (comprendre : permettre aux opérateurs de déployer les réseaux dans les immeubles) comme l'a annoncé Nathalie Kosciusko-Morizet, la secrétaire d'Etat, les opérateurs ont obtenu l'assurance qu'aucune décision ne les obligera à revenir sur les déploiements réalisés dans les immeubles d'ici au mois de juillet. D'autre part, l'Arcep va lancer une consultation publique pour préparer les décisions qui seront prises cet été. Avant de fibrer une copropriété, l'opérateur choisi par le syndic devra demander aux autres FAI s'ils souhaitent la pose de fibre surnuméraire Cette consultation porte, principalement, sur deux points : la définition précise de la notion de zone dense et le principe de cofinancement des investissements réalisés dans les immeubles dans lesquels seront posés plusieurs réseaux montants. En clair : avant de fibrer une copropriété, l'opérateur choisi par le syndic devra demander aux autres FAI s'ils souhaitent ou non la pose de fibre surnuméraire, et celui qui la demandera devra partager le coût d'installation avec l'opérateur de l'immeuble. Principal avantage de ce dispositif : faire tomber les arguments de France Télécom contre ce modèle. L'opérateur historique estime en effet que les surcoûts induits par ce modèle sont trop élevés pour qu'il puisse être mis en oeuvre. Une affirmation que contestait Iliad qui estimait le surcoût entre 10 et 15%. Avec la proposition mise sur la table par l'Arcep, le débat semble clos. Ce qui est étonnant c'est que ce principe soit maintenant soumis à consultation : on connaît, par avance, la réponse des opérateurs. Les pouvoir publics ne veulent pas braquer l'opérateur historique Pourquoi retarder de trois mois une décision qui aurait pu être prise dès mardi matin, sinon pour ne pas braquer l'opérateur historique à un moment où il est sous le feu nourri de ses concurrents, aussi bien en ce qui concerne le tarif du dégroupage qu'en ce qui concerne sa stratégie dans les contenus. D'ailleurs, Jean-Claude Mallet n'a pas caché qu'il souhaitait un cessez-le-feu. Répondant à une question sur la séparation fonctionnelle de France Télécom, réclamée par les opérateurs alternatifs, le président de l'Arcep a ainsi demandé que « l'on calme le jeu sur ce sujet ». Rappelant que la séparation fonctionnelle était un outil qui sera mis à disposition des autorités nationales de régulation dans le cadre de la refonte des directives européennes, Jean-Claude Mallet a souligné que ce remède, selon Bruxelles, devait être envisagé « dans des cas exceptionnels, quand la concurrence ne fonctionne pas et que le marché est en échec. Ce n'est pas le cas aujourd'hui en France. » Source EuroTMT 2009, l'année de la fibre ? En présentant leurs comptes annuels 2008, les trois principaux opérateurs français l'avaient reconnu : faute d'un cadre réglementaire finalisé, leurs investissements dans la fibre optique étaient parcimonieux. Pour autant, le bilan publié par l'Arcep montre néanmoins une avancée significative du pré déploiement. Selon l'Arcep, si la France ne comptait que 170 000 abonnés très haut débit à fin 2008 (dont 130 000 via Numéricâble), 20 500 immeubles, représentant 550 000 foyers, étaient déjà raccordés à au moins un réseau en fibre optique. Si les pouvoirs publics se donnent encore trois mois pour finaliser le cadre, l'année 2009 devrait néanmoins permettre le décollage du très haut débit en France.