FAI : Sans réseau propre, point de salut
Le cabinet d'études Ineum Consulting publie un « teaser » intitulé « Les FVNO sont morts, vive les FAI opérateurs de réseaux ». Bertrand Le Conte de Poly, Manager chez Ineum Consulting, nous explique en quoi la maîtrise du réseau est une clé de succès majeur pour les FAI.
R&T : Selon vous, les opérateurs sans réseau sont-ils voués à une mort certaine ? Bertrand Le Conte de Poly : Globalement oui. Si certains survivent, ils demeureront marginaux. Nous sommes partis d'un constat : les FAI distribuent du contenu numérique de plus en plus évolué, qui requière toujours plus de bande passante. Ils proposent en effet des services gourmands en capacité, notamment de la vidéo HD et des services en Peer to Peer. Or, seule la possession du réseau permet de maîtriser l'offre et les coûts. Il faut que les opérateurs se libèrent des contraintes tarifaires des fournisseurs tiers. Lorsque France Télécom contrôlait seul son réseau et le louait à d'autres opérateurs, les concurrents ne gagnaient pas d'argent. Le dégroupage a changé la donne. Ainsi, sur un même FAI, il y a un coût de 5 euros/mois d'écart, soit 20% de l'offre triple play, entre une zone dégroupée et une zone non dégroupée. A ce jour, seuls 4 opérateurs ont investi dans le dégroupage (Free, Neuf Cegetel, Club Internet et Alice). Ils dominent actuellement le marché. R&T : Pourtant les investissements dans le dégroupage et dans les déploiements fibres sont conséquents. Ne vaut-il pas mieux louer et miser sur les services ? B.L.C.P : Tous les opérateurs ayant procédé à de lourds investissements cherchent à grossir pour rentabiliser leur modèle. Neuf Cegetel a acquis AOL et rachète Club Internet, c'est un signe. Les opérateurs cherchent ainsi à créer des effets de leviers et à dépasser une masse critique. Ensuite, ils ouvriront certainement leurs réseaux optiques à d'autres opérateurs. Un équilibre de marché provisoire va alors se créer entre opérateurs d'infrastructures et opérateurs virtuels. Mais à terme, les propriétaires des réseaux, disposant de coûts de transport plus faibles, vont creuser l'écart. Ils lanceront des offres plus attractives. Mieux vaut donc posséder son réseau. R&T : Vous ne croyez pas au modèle Darty ? B.L.C.P : C'est un modèle vraiment à la marge. Le facteur différenciateur de Darty c'est son savoir faire et son service clients. Ils occupent un créneau délaissé par les FAI, celui de la qualité de service. C'est un réel facteur de succès. Mais ils resteront sur une niche. R&T : Suivez-vous la même logique sur les MVNO ? B.L.C.P : Oui, en dehors des acteurs de niches (transfrontaliers, opérateurs very low cost...), je ne vois pas de gros MVNO décoller. Et je ne les perçois pas investir sur les services à valeur ajoutée, notamment data et vidéo. R&T : Réciproquement, croyez-vous à la stratégie de SFR dans le fixe ? B.L.C.P : Le modèle n'est pas du tout le même que celui de Darty. SFR a beaucoup hésité et se lance dans le fixe un peu contraint. C'est une stratégie défensive pour aller récupérer du trafic voix cannibalisé par les FAI. Ces derniers, agressifs sur les tarifs, ont concurrencé la voix mobile. En effet, bon nombre de communications à la maison sont passées depuis un mobile. Le développement des offres triple-play casse la valeur de la voix. La grande crainte des opérateurs mobiles est de voir se développer les offres de convergence fixe-mobile des FAI. SFR riposte donc avec son offre Home-Zone.