Comment rater un casse de 150 M$
Plus fort encore que l'attaque du train postal. Le techno-thriller publié par le quotidien australien SMH est un mélange subtile de Ocean 11, de Haute Voltige, de Usual Suspect et d'Operation Espadon*. La veille des fêtes de noël 2003, une équipe internationale de cybervoleurs s'attaque aux comptes de la JP Morgan Chase Bank. Sans arme, sans même pénétrer dans l'établissement, en douceur, en émettant simplement un ordre de virement faxée depuis un bureau de l'opérateur Telsra, et semblant émaner d'un organisme gouvernemental gérant un portefeuille de près de 5,5 milliards de dollars australiens. L'ordre de virement est « authentifié et confirmé » au téléphone par un complice, et la somme répartie sur quatre banques dans le monde : deux à Hong Kong, une en Suisse, la dernière en Grèce. Il ne reste plus qu'à profiter des 5 jours de congé de noël pour vider les comptes distants.
Hélas, il existe deux types de casses informatiques. Ceux dont les journaux ne parlent jamais et qui sont « discrètement épongés » par les banquiers, et ceux qui font le bonheur des échotiers et la hune des quotidiens. Ceux là s'achèvent généralement de façon tragique coté truands. Pour deux mots, deux petits mots inappropriés et ajoutés après le nom d'un bénéficiaire des virements, la machine s'enraye. La Grèce retarde le versement. Puis un contretemps festif repousse la vidange du compte Helvétique. Le pot aux roses est découvert, les patrons de la JP Morgan jouent alors contre la montre. Les coups de fils internationaux se succèdent. L'équipe de Hong Kong parvient presque à ses fins, 3,4 M$ se sont déjà évaporés dans un casino flottant de Repulse Bay. Mais la police intervient, et en quelques jours, la bande est mise à l'ombre. Employés des télécoms affranchis, conseiller en sécurité et expert anti-fraude « retournés », businessmen véreux, truands connus, hommes de paille, « taupe » agissant à l'intérieur de la banque, mafieux russes et demi-sels d'Afrique du Sud, si l'équipe se retrouve sous les verrous sans le moindre butin, elle conserve au moins la possibilité de revendre le scénario à un producteur d'Hollywood. JP Morgan, aux dernières nouvelles, n'a toujours pas récupéré les 3,4 millions de dollars flambés sur le tapis vert. Demander à un tripot chinois de restituer la moindre somme lorsque la ville se trouvait encore sous protectorat britannique, c'était déjà fort improbable, intérêts supérieurs du Commonwealth ou pas. Mais depuis que Hong Kong a réintégré le giron de la Chine continentale, l'improbable s'est transformé en impossible. Reste à demander la mise sous séquestre des droits d'exploitation cinématographiques. Avec Robert Redford et Hall Berry, ca devrait bien nous faire 8 à 10 millions d'entrées la première semaine.
* ndlc : Je les ai tous en DVD !