Comment La Poste et GDF Suez vont réduire leur facture télécoms
Réduire sa facture télécoms est une affaire longue et complexe, comme le montrent deux exemples pris dans deux grands comptes du secteur public : La Poste et GDF Suez. Ils ne cachent rien de leurs méthodes, de leurs réussites et de leurs difficultés pour mettre en place ces réductions de dépenses.
La réduction de la facture télécoms porte un nom, celui de TEM, Telecom expense management. Il n'a pas connu de grand succès en France. Les choses sont peut être en cours d'évolution comme l'a montré un récent débat du Crestel. A La Poste, parmi les 12 missions assignées à la DSI, l'une d'elles concerne depuis 2010 les télécoms. Une mission compliquée, la difficulté à collecter les éléments d'informations sur les dépenses et les usages, le périmètre exact de ces dépenses, la fiabilité des informations collectées, rien n'est évident.
«Avant de chercher la réduction des dépenses, on cherche donc à maîtriser ces dépenses » explique Sébastien Rodrigues, directeur de projet SI au GroupeLa Poste. Autrement dit, le processus interne de repérage, d'analyse et de décision sur les dépenses précède toute autre démarche. Précède en particulier les futurs appels d'offres. Cette démarche part de la DSI centrale mais doit concerner toutes les DSI de chaque métier. La Poste compte 4 branches : courrier, colis, banque, enseigne. La réduction des dépenses télécoms commence par une étude d'opportunité dans les quatre branches métiers autour de ce sujet de la réduction des dépenses. Nous sommes loin d'une stricte opération de cost killing tenue par une direction des achats.
« L'essentiel est de réussir les inventaires »
A GDF Suez, processus voisin, puisqu'existent une DSI corp pour la maîtrise d'ouvrage et une Direction des services partagés, opérationnelle pour les différentes branches. La démarche TEM est logée dans cette direction des services partagés. Là aussi, le processus est complexe, « l'essentiel est de réussir les inventaires, c'est la clé de la démarche TEM » analyse Olivier Deprez, Contract management leader telecom and network à la DSI Group (Manager de la gestion des contrats cadres telecoms) à GDF Suez : « nous voulons plus de la lisibilité dans les inventaires car on a pas assez d'informations venant des différentes directions ».
Loin des opérationnels, l'équipe TEM, avant de mettre en place un plan de diminution des dépenses doit maîtriser les inventaires, savoir où sont les dépenses et qui les gère. L'équipe TEM fait appel à beaucoup d'interlocuteurs différents et regarde des processus différents. Elle va recouvrir la maîtrise des dépenses dans tout le groupe avant même d'engager une action centrale sur les dépenses et les différents contrats.
D'abord comprendre où sont les dépenses
Cette étape préalable est nouvelle. Jusqu'à présent, toute une théorie circulait sur la réduction des dépenses avec des méthodes venues d'outre-atlantique à appliquer directement. La réalité l'emporte heureusement et les grands comptes, y compris publics, comme on le voit dans nos deux exemples, procèdent avec prudence et n'appliquent des processus qu'en comprenant auparavant où se situent les dépenses dans leurs groupes.
Paradoxalement, Olivier Deprez fait remarquer qu'avant de songer à réduire les coûts, il faut veiller à ne faut pas perdre d'argent ! Exemple, un contrat cadre est signé avec un opérateur, contrat qui offre des remises, mais ces remises ne sont pas pratiquées dans une région d'outre-mer. L'opérateur se garde bien de signaler cet « oubli ». Au client de surveiller la bonne application des contrats opérateurs.
Le « one shot » est l'ennemi
Autre précaution, quand on applique un plan de réduction des dépenses, il faut veiller à son application dans la durée, pas sur une courte période. Le « one shot » est l'ennemi d'une bonne démarche TEM. Et pourtant, les DSI ou les DG sont friands de coupes rapides, de résultats visibles. Tout l'art d'une bonne démarche TEM c'est aussi de leur faire comprendre la nécessité d'enraciner en profondeur cette démarche, pas seulement pour un résultat immédiat.
Une fois ces précautions prises, les deux entreprises ont engagé des politiques de réduction des dépenses. La Poste a identifié 25 services réseaux et télécoms, classés en quatre grandes familles : la voix fixe, la voix mobile, la data fixe et la data mobile. Le processus de nouvelle gestion engagé par l'entreprise agit sur plusieurs points : la gestion des contrats et des commandes, la gestion des factures, celle des litiges, l'analyse des usages, le reporting et l'analyse, la gestion des inventaires.
La data Wan pèse 15 ME
Chez GDF Suez, l'action porte sur quatre familles :la data Wan(15 ME de dépenses annuelles), la voix fixe, la voix mobile, les autres services. La solution adoptée passe par la gestion de commandes, l'intégration de la facturation, la mise en place de rapports d'analyse, la mise en place d'une gouvernance TEM.
La Poste a débuté son processus fin 2011, a signé un contrat au mois de juillet 2012 avec son conseil, le pilote s'est achevé au mois de juin dernier. Chez GDF Suez, la décision s'est prise au mois de juillet 2012, la signature du contrat est en cours. Les deux entreprises ont signé avec Tactem (expert en modélisation de la donnée), du groupe Econocom. L'association des deux compétences, celle d'un cabinet conseil en TEM et d'une société de services a séduit, la seule compétence TEM ne suffit pas. Aujourd'hui, les projets de TEM remontent à la DSI et sont gérés comme des grands projets structurants de DSI. C'est aussi tout l'intérêt de ces deux témoignages.