Alcatel-Lucent sous la pression du gouvernement
Réduire les coûts, céder des activités, se relancer sur l'IP et le cloud : Alcatel-Lucent connaît sa feuille de route avec le plan Shift. Mené tambour battant, il butte néanmoins en France sur les réalités locales et à l'international sur la difficile cession de la branche entreprise.
Difficile d'obtenir des informations sur Alcatel-Lucent, l'entreprise ne communique pas, les syndi-cats non plus par respect pour leur entreprise. Seules les agences financières américaines affirment qu'elles ont des informations exclusives, laissant entendre qu'un autre équipementier, der-nièrement Bloomberg citait Unify, un chinois ou un fonds d'investissement tiendrait la corde pour reprendre l'activité entreprise.
Selon la CFE-CGC, la vente de cette branche est certaine, le nouveau Pdg Michel Combes l'a confirmé au mois de décembre dernier se fixant pour objectif de boucler le dossier pour la mi 2014. C'est Michel Emelianoff lui-même (en photo) qui serait chargé du dossier. Il est depuis deux ans vice-président du groupe et président de sa branche entreprise. Le groupe aurait envisagé toutes les hypothèses y compris celle d'une vente d'un côté de la voix et de l'autre de la data. La cession de la totalité de la branche entreprise serait actuellement envisagée. Des sources font état d'un second appel d'offres en cours, le premier n'ayant rien donné.
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La branche entreprise pèse selon l'agence Bloomberg 764 millions d'euros de chiffre d'affaires (5% du CA total du groupe) pour une perte opérationnelle de 12 millions d'euros avec 2 800 salariés dans le monde dont 1 400 en France, où sa part de marché est de 43% selon MZA, devant Aastra dix points derrière et Unify à 8%. Le prix de vente selon Bloomberg avoisinerait les 250 millions d'euros. Cette branche d'activité compte un large portefeuille avec de la téléphonie d'entreprise, des solu-tions de mobilité, de cloud computing (Open Touch), de communication unifiée (Open Touch Communication), de réseaux intelligents. Son poids en France explique la sensibilité portée à ce dossier.
Le groupe est d'ailleurs contraint de donner des gages au gouvernement. C'est le sens de la réduc-tion des suppressions de postes, passée de 900 à 669 annoncée en CCE mercredi 15 janvier et de la phrase de Michel Combes livrée dans une interview au journal Le Monde : « La mobilisation des pouvoirs publics a donné des résultats concrets. Arnaud Montebourg et Fleur Pellerin, sa ministre déléguée à l'économie numérique ont très vite interpellé les acteurs du secteur, à commencer par les opérateurs de télécom, pour qu'ils se rapprochent d'Alcatel-Lucent. »
Free réfractaire aux charmes d'Alcatel-Lucent
En clair, c'est grâce aux pouvoirs publics que l'équipementier a vu SFR lui signer un nouveau contrat pour moderniser son réseau d'accès très haut débit en achetant des commutateurs 1830 Photonic Service Switch (PSS). Orange est déjà un bon client, Michel Combes se dit confiant chez Bouygues Télécom mais déçu par Free. La pression du gouvernement offre chez les opérateurs français des possibilités de contrat à Alcatel-Lucent. Les pouvoirs publics voulant écarter les équipementiers chinois au profit d'un acteur français en difficulté. Les opérateurs qui eux-mêmes veulent séduire le gouvernement font tout pour lui être agréable.
Parallèlement, Alcatel-Lucent est engagé dans une très délicate opération de désengagement de sites historiques en France, dont celui d'Orvault, près de Nantes (le fief du 1er Ministre) qui compte 483 salariés. 170 de l'activité R&D vont rejoindre Altran. Alcatel-Lucent cherche des solutions pour les autres avec des acteurs locaux.