Aero, pompe funeste
Ce n'est plus de la grogne, c'est de la hargne. Plusieurs constructeurs d'ordinateurs portables se plaignent de la gourmandise énergétique de Vista, et plus particulièrement de son interface Aero, laquelle aurait tendance à transformer les accumulateurs les plus conséquents en nourrices sèches en un temps record. Aero désactivé, les consommations comparées à celles de Windows XP s'avèrent sensiblement comparables... il suffit donc de supprimer Aero. Mais Vista sans Aero, ce n'est jamais que du XP monté en graine... plus rien ne justifie alors le débours de près de 600 euros de noyau, de plus de 2 Go de mémoire et 11 de disque, de processeurs bi-coeur 64 bits, de bus PCI-E dopés et autres extension Readyboost rapide si l'on ne peut plus jouer avec quelques gadgets. Dilemme digne de Polyeucte. *
Il n'en demeure pas moins qu'Aero fait partie des choses intelligentes intégrées par Microsoft au coeur même de Vista. Cette « interface » -ou plus exactement son traitement- est abandonné au processeur graphique, libérant ainsi la CPU pour que celle-ci se consacre à des choses plus importantes (NdlC : les UAC par exemple ?). Une leçon qu'Apple avait compris depuis quelques lustres déjà. Machines de bureau et serveurs d'entreprise se voient libérés d'une entrave technique qui devenait de plus en plus lourde au fur et à mesure qu'enflait le « Presentation Manager » microsoftien. Sur les PC portables, c'est une tout autre histoire. Car si en supprimant Aero l'on économise les piles, le processeur central doit à nouveau assumer la charge de choses purement cosmétiques, ce qui ralenti d'autant la vitesse d'exécution consacrée au travail effectif de computation. S'ajoute à ce problème le fait que l'étage graphique des ordinateurs portables d'entrée de gamme repose généralement sur un partage de la mémoire centrale traditionnellement exploitée par la CPU, déplacement qui n'est pas sans conséquence dans la rapidité d'exécution des processus de calcul et d'affichage. Grace donc à Aero, le monde de la mobilité véritablement autonome va enfin renouer avec les « packs batterie » valant leur pesant de plomb, cadmium, nickel et autres métaux lourds, les bilans énergétiques à la recharge deviendront dignes d'une tranche supplémentaire de Tricastin et les frères ennemis ATI et Nvidia imaginent déjà les bénéfices promis par cette course à la décentralisation du traitement des processus vectoriels. L'arrivée d'Aero, combinée à la frustration des éditions Vista d'entrée de gamme, pourrait bien, du moins pour un temps, éliminer du marché les « portables à 400 Euros » et renouer avec la tradition des ordinateurs que l'on achète « parce qu'ils ne ressemblent pas à celui de ma secrétaire ».
*NdlC, note de la correctrice : Citation manifestement provocante et provoquée afin que l'on puisse évoquer le second vers de la seconde réplique de Polyeucte (acte I scène 1) « ... Et le désir s'accroît quand l'effet se recule ». Laquelle répond nécessairement à l'acrostiche d'Horace (acte II, scène 3, vers 444 et suivants) que l'honneur et la décence nous interdisent d'écrire... histoire d'inciter les jeunes générations à se ruer sur les classiques et à comprendre que la cryptanalyse commence avec la connaissance des belles lettres. Dans le même registre, nous ne saurions trop conseiller la lecture attentive de cette réécriture de Phèdre par Monsieur Pierre Dac.