Les réactions se multiplient après l'annonce d'ouverture de Microsoft
La Commission européenne a été la première à réagir. Elle dissocie l'annonce d'hier de Microsoft et les procédures en cours. Les analystes soulignent son importance. En revanche, les opposants campent sur leurs positions. Et l'ISO doit se réunir prochainement.
Pour beaucoup d'analystes, mais également en interne chez l'éditeur, l'annonce de Microsoft apparait comme un argument destiné à contrer les procédures engagées par les régulateurs américains, européens et asiatiques contre les positions dominantes de l'éditeur. De fait, l'annonce de Microsoft pourrait n'être qu'une nouvelle promesse alors que l'éditeur affirme qu'elle répond aux demandes des régulateurs européens. La Commission Européenne a ainsi exprimé son scepticisme, et rappelé que l'annonce n'est pas liée aux procédures et aux allégations d'abus de position dominante en cours. Il n'est donc pas question pour le moment de revoir ces procédures. Maintien de plainte De même pour l'ECIS (European Committee for Interoperable Systems) - qui représente les intérêts d'IBM, Nokia, Sun, RealNetworks et Oracle - qui maintient la pression et sa plainte. L'annonce de Microsoft devrait cependant servir d'argument aux représentants de l'éditeur. Il se pourrait donc que l'Europe, qui craint l'effet d'annonce, réserve son jugement dans l'attente d'en mesurer les effets sur le long terme... Difficile également de présager de ce qui se déroulera lors de la prochaine réunion de l'ISO (dans quelques jours), dernière ligne droite pour la reconnaissance du format OOXML, qui pourrait se révéler capitale pour Microsoft. L'industrie applaudit à la démarche de Microsoft L'annonce de Microsoft a en tout cas retenu positivement l'attention de l'industrie. L'Afdel (Association Française des éditeurs de logiciels), sans surprise et par la voix de Loïc Rivière, son délégué général, n'a pas manqué de se féliciter de l'engagement de l'éditeur. "C'est une excellente nouvelle pour les industriels ! Cette volonté d'ouverture s'inscrit en phase avec les attentes des utilisateurs. Elle confirme l'évolution déjà amorcée par Microsoft, notamment à travers la normalisation d'Openxml dont les industriels attendent qu'elle aboutisse rapidement." "L'interopérabilité est en effet un enjeu crucial du secteur. Tous les industriels vont pouvoir travailler dans l'environnement Microsoft avec davantage de visibilité et de prédictibilité. Microsoft sera désormais l'un des environnements les plus ouverts et accessible à tous sur un pied d'égalité. C'est donc une initiative très positive et même audacieuse de la part de Microsoft, dont nous espérons qu'elle fera des émules. Car il faut désormais espérer que les autres acteurs 'structurants' du marché suivent la même voie..." L'Open Solutions Alliance (OSA), association dont la vocation est de favoriser l'interoperabilité, par l'intermédiaire de Dominic Sartorio, son Président américain, déclare également sa satisfaction, mais reste prudent : "L'OSA croit que la volonté des clients prend toujours le dessus. Les clients apprécient de travailler dans un climat de transparence et d'ouverture en étroite collaboration avec les interlocuteurs qui produisent et se chargent de la maintenance de leurs produits, que ce soit une communauté de développeurs ou une entreprise." "Nous pensons que des fabricants ne travaillant pas de cette façon convergeront vers ce modèle à l'avenir, donc nous accueillons favorablement l'ouverture de Microsoft vers interopérabilité. Nous constatons que ceci représente une reconnaissance tacite que l'Industrie logicielle est en train de changer et que Microsoft essaie d'évoluer et semble favoriser l'ouverture. Mais nous attendrons de voir comment cela se traduit dans les mois à venir." Réactions négatives des communautés La propension de Microsoft à embrasser, moins soudainement que largement, la communauté des développeurs Open Source laisse également sceptique. L'annonce "apparaît soigneusement conçue pour exclure la concurrence de la communauté open source", a ainsi déclaré Michael Cunningham, conseil de Red Hat. De son côté, à l'April, association pour la promotion et la défense du logiciel libre, on affirme que "cette nouvelle stratégie ne va pas au bout de la démarche et continue d'exclure le monde du logiciel Libre de l'accès aux formats et aux protocoles utilisés dans les logiciels de Microsoft". L'association met en avant les brevets et licences qui demeurent chez l'éditeur. "La plupart de ces protocoles sont couverts par des brevets, et les licences de ces brevets ne pourront être obtenues qu'à des conditions dites 'raisonnables et non-discriminatoires', Ce type de licence nécessitant rémunération par copie de programme favorise les monopoles au détriment des PME et exclut de fait l'ensemble des développeurs de Logiciels Libres. L'entreprise de Redmond annonce habilement qu'elle ne poursuivra pas en justice les développeurs de Logiciels Libres qui procèdent au développement et à la distribution non-commerciale de logiciels reposant sur ses protocoles, mais précise bien que toute distribution commerciale devra s'accompagner d'une acquisition de licence de brevet, contre rémunération. " "Dans le monde du Logiciel Libre, il n'y a pas de distinction entre distribution non-commerciale et distribution commerciale: les développements réalisés par des bénévoles peuvent être vendus par des entreprises, et inversement les développements menés par des entreprises peuvent ensuite être distribués de façon non-commerciale. Toute entrave à la distribution, même commerciale, d'un logiciel est contraire aux libertés fondamentales du Logiciel Libre. La rémunération de licence de brevets est incompatible avec le développement du Logiciel Libre", a précisé Thomas Petazzoni, administrateur de l'April. "Pour cette raison, les documentations mises à disposition par Microsoft, bien qu'intéressantes sur le plan technique, ne pourront donc très certainement pas être utilisées par la communauté du Logiciel Libre pour améliorer l'interopérabilité avec les solutions de la firme étatsusienne."